Dans une décision du 20 octobre 2022, les juges de la Cour d’appel de Lyon n’hésitent pas à condamner in solidum le vendeur d’un terrain pollué et les deux notaires ayant participé à l’élaboration de l’acte authentique de vente.
Dans l’espèce concernée, des particuliers découvrent, à l’occasion de travaux d’agrandissement, une nappe visqueuse noire importante d’hydrocarbures dans les sols au fond de leur jardin, nécessitant l’interruption des travaux. Par la suite, des analyses complémentaires sont effectuées et le rapport de l’expert conclut à l’existence d’une pollution conduisant à considérer le terrain comme un site pollué à risque trouvant son origine dans l’exploitation d’une ancienne blanchisserie industrielle.
Les propriétaires de l’immeuble concernés décident alors d’assigner en justice le vendeur de l’immeuble et les deux études notariales ayant participé à la cession.
Infirmant partiellement le jugement du tribunal judiciaire, la cour d’appel, dans sa décision du 20 octobre 2022, décide de condamner :
– le vendeur pour manquement à son obligation de délivrance conforme. La cour d’appel constate notamment que ce dernier a participé activement à la gestion d’une société industrielle sise sur le site dont fait partie le bien vendu, société inscrite dans les fichiers de la DREAL, relevant du régime d’autorisation des ICPE. Il ne pouvait alors ignorer au moment de la vente de son bien, l’existence du passé industriel de la propriété. La chose vendue n’était donc pas conforme à la description qui en avait été faite dans l’acte authentique de vente.
– Les deux notaires, pour manquement à leur obligation d’information et de conseil engageant leur responsabilité. En effet, en se limitant à rappeler les dispositions de l’article L. 514-20 du Code de l’environnement et en l’absence de délivrance aux acquéreurs d’informations concernant le passé industriel du site, de tout conseil ou de toute mise en garde visant à éclairer les acquéreurs sur les inconvénients du bien, les notaires n’ont pas permis à ces derniers d’apprécier les caractéristiques essentielles du bien acheté.
La cour d’appel relève à cet égard :
– Qu’aucune consultation du fichier BASIAS n’a été faite par les notaires préalablement à la vente du bien,
– Qu’aucune investigation n’a été menée pour savoir si une ICPE avait été exploitée ou non sur le site, ou si des prescriptions avaient pu être prises dans le cadre d’un changement d’usage et si la cessation de l’activité avait été déclarée à l’administration,
– Qu’un des notaires avait connaissance du passé industriel du site.
En conséquence, le vendeur et les notaires sont condamnés in solidum à payer près de 900 000 euros de dédommagements correspondant au coût estimé de la dépollution, ainsi qu’une indemnisation pour le préjudice moral, de jouissance et d’anxiété.
Cette décision constitue une parfaite illustration de l’importance pour les vendeurs et pour les notaires de réaliser toutes les diligences requises par la situation d’un terrain potentiellement pollué en raison d’une ancienne ICPE.