En ce premier semestre de l’année 2025, nous proposons de revenir brièvement sur quelques arrêts rendus l’année passée par la Cour de cassation qu'il nous semblait intéressant de remettre en lumière pour notre pratique.
L’année a commencé avec un revirement de jurisprudence opéré par la troisième chambre civile dans un arrêt du 21 mars 2024 (Cass. 3ème civ. 21 mars 2024, n° 22-18.694). La Cour de cassation, renversant sa jurisprudence de 2017, indique que les travaux d’adjonction sur existant d’éléments d’équipements dissociables, non-constitutifs d’un ouvrage, qu’ils soient inertes ou destinés à fonctionner, ne relèveront désormais plus de la garantie décennale obligatoire, mais de la garantie contractuelle de droit commun des constructeurs, sauf si l’élément d’équipement constitue en lui-même un ouvrage et qu’il y a une atteinte à sa solidité ou à sa destination (sur cet arrêt, v. notre post LinkedIn et notre newsletter de mars 2024). La Cour abandonne ainsi sa jurisprudence de 2017 qui conduisait à soumettre à l’assurance obligatoire l’installation d’un élément d’équipement sur existant susceptible de rendre l’ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination (Cass. 3ème civ. 15 juin 2017, n° 16-19.640).
Dans un second arrêt rendu quelques semaines plus tard (Cass. 3ème civ. 30 mai 2024, n° 22-20.711), la Cour de cassation précise le champ d’application de l’assurance décennale obligatoire en présence de travaux consistant en l’adjonction d’un ouvrage sur un existant. Elle indique que l’assurance obligatoire en cas de dommages sur existants provoqués par la construction d’un ouvrage neuf ne s’applique que si deux conditions cumulatives, sont réunies : (i) une indivisibilité technique entre l’ouvrage existant et l’ouvrage neuf, laquelle indivisibilité (ii) doit procéder de l’incorporation totale de l’existant dans le neuf et non de l’incorporation de l’ouvrage neuf dans l’ouvrage existant (pour une analyse de cette décision, V. notre post LinkedIn et notre newsletter juillet 2024).
Soulignons que ces deux décisions publiées au Bulletin devraient trouver à s’appliquer notamment dans le cadre des contentieux impliquant des désordres affectant les panneaux photovoltaïques (sur ce sujet, vous pouvez consulter notre article sur « La couverture des installations photovoltaïques en toiture en matière d’assurance de responsabilité décennale obligatoire » paru dans notre newsletter en date de juin 2024).
Pour conclure ce bilan, dans un troisième arrêt (Cass. 3ème civ. 19 décembre 2024, n° 23-15.039) rendu dans le cadre d’un litige opposant des vendeurs en VEFA et leur assureur à un syndicat de copropriété du fait de désordres affectant la toiture. La Cour de cassation souligne que « les locateurs d’ouvrage et le vendeur d’immeuble à construire ne sont tenus à une responsabilité de plein droit à raison des désordres à l’ouvrage de nature décennale que si ceux-ci sont imputables aux travaux qu’ils ont réalisés ou fait réaliser » et censure l’arrêt d’appel qui a retenu la responsabilité décennale sans avoir recherché si le désordre n’avait pas été causé ou aggravé par les « quelques interventions ponctuelles » réalisées sur la toiture qui n’avait pas été révisée ou s’il était imputable à l’ouvrage existant.
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