L’ordonnance n° 2014-159 du 20 février 2014 relative au logement intermédiaire introduit dans le Code de la construction et de l’habitation (art. L. 254-1 à L. 254-9) un nouveau bail de longue durée appelé « bail réel immobilier », réservé à la production de logements à des prix abordables. Ce nouvel outil a vocation à être utilisé dans les zones « tendues » au sein desquelles il est indispensable de proposer une offre intermédiaire entre le parc libre et le parc social
L’ordonnance n° 2014-159 du 20 février 2014 relative au logement intermédiaire introduit dans le code de la construction et de l’habitation (art. L. 254-1 à L. 254-9 CCH) un nouveau bail de longue durée appelé « bail réel immobilier », réservé à la production de logements à des prix abordables.
Ce nouvel outil a vocation à être utilisé dans les zones « tendues » au sein desquelles il est
indispensable de proposer une offre intermédiaire entre le parc libre et le parc social, et que le
gouvernement-législateur a pris le soin de définir comme regroupant :
- d’une part, les communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000
habitants telles que définies par l’article 232 du code général des impôts (communes
assujetties à la taxe sur les logements vacants) ; - d’autre part, les communes de plus de 15 000 habitants en forte croissance démographique
énumérées par le décret pris pour application de l’article L. 302-5 du code de la construction
et de l’habitation.
En effet, l’objectif poursuivi par le bail réel immobilier dédié au logement (que l’on pourrait nommer le
« BRILO ») est de remédier à la décorrélation entre le revenu disponible des ménages et le prix des
logements, qui tend à exclure la classe intermédiaire – et particulièrement les jeunes ménages primoaccédant avec des enfants en bas âge – du marché du logement dans lesdites zones tendues.
A travers le BRILO, l’idée du Gouvernement, qui s’appuie sur de nombreuses études et notamment sur
les travaux menés sur ce thème avec l’étude CHEUVREUX-Notaires par Jean-Yves Mano (adjoint au
Maire de Paris en charge du logement), consiste à dissocier le foncier du bâti pour diminuer le prix des
logements qui seront proposés sur le marché en l’amputant de tout ou partie du coût du foncier,
lequel peut représenter jusqu’à 40% du prix d’un logement dans la capitale.
Les personnes publiques propriétaires de terrains ou de bâtiments à réhabiliter, mais également de
nombreuses personnes privées (associations, fondations, organismes fonciers solidaires), pourraient
ainsi privilégier l’offre de logements intermédiaires en faisant un effort sur le prix de leur foncier dans
le cadre de ce nouveau bail.
Naturellement, le BRILO n’est que l’un des outils développés par les pouvoirs publics pour atteindre
l’objectif des 500 000 logements nouveaux par an. Mais il présente au moins deux atouts
majeurs.
1) D’abord, il s’agit d’un dispositif équilibré, qui permet de valoriser un foncier par la réalisation d’un programme de logement, tout en garantissant au propriétaire que son effort sur le prix du terrain
ne sera pas détourné. En effet, le nouvel article L. 254-1 du CCH prévoit l’affectation et le prix des
logements en cause.
S’agissant de l’affectation des logements réalisés dans le cadre d’un BRILO, ils devront être
« Destinés, pendant toute la durée du contrat, à être occupés, à titre de résidence principale, par des
personnes physiques dont les ressources n’excèdent pas des plafonds » qui seront fixés par décret.
Quant à leur prix, l’article L. 254-1 dispose que, « pendant toute la durée du contrat, le prix
d’acquisition ou, pour les logements donnés en location, le loyer n’excède pas des plafonds fixés par
décret […]».
2) Ensuite, le BRILO introduit en droit français le concept de propriété temporaire d’un logement, qui existe dans de nombreux pays (Angleterre, Suède, Pays-Bas, Chine), et ouvre ainsi un nouveau marché entre la location et la propriété perpétuelle.
Il ne fait pas de doute que les prix des logements qui seront réalisés dans ce cadre seront le premier facteur d’attractivité du dispositif. Mais il faut également noter que le Gouvernement a apporté de nombreuses garanties aux futurs acquéreurs des logements qui disposeront notamment :
- de la possibilité d’apporter en garantie leurs droits réels pour financer l’acquisition de leur
logement ; - d’une véritable propriété des constructions, sur de nombreuses générations (la durée du
BRILO peut aller jusqu’à 99 ans !), et de façon stable puisque le contrat ne peut prévoir
aucune faculté de résiliation unilatérale ; - de la possibilité de céder leur logement, selon une méthode de calcul qui fera l’objet d’un
décret en Conseil d’Etat qui devrait permettre d’obtenir non pas un prix administré mais un
prix régulé fondé sur l’observation des évolutions du marché ; - de la liberté de louer le logement à une personne remplissant les conditions de ressources, ce
qui permettra également à des investisseurs d’acquérir des programmes de logements réalisés
dans le cadre d’un BRILO en vue de proposer des locations à un prix intermédiaire
Il faut enfin relever que le Gouvernement a pris garde à ce que le dispositif relatif au logement
intermédiaire ne nuise pas au développement de l’offre de logements sociaux, qui doit correspondre à
150 000 logements sur les 500 000 attendus.
C’est certainement la raison pour laquelle l’Etat et ses établissements publics, à l’exception des
établissements publics fonciers, ne pourront pas consentir de BRILO. On sait en effet que la loi
n°2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement
permet à l’Etat et ses établissements publics de céder leurs terrains à un prix décoté à des collectivités
territoriales lorsqu’il s’agit de favoriser la réalisation de programmes de constructions comportant
essentiellement des logements dont une partie au moins est réalisée en logement social (Bull.
Cheuvreux-Notaires, n°72, avril 2013, p. 8).
Un prochain numéro du Bulletin de Cheuvreux-Notaires présentera l’articulation de l’ensemble des lois
et ordonnances portées par la Ministre Cécile Duflot, et contiendra notamment une étude détaillée des
dispositions relatives au BRILO.
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