Cheuvreux Paris

Habitat dégradé : aperçu des nouvelles mesures législatives

24 Avr 2024 Newsletter

Voulu comme un mécanisme d’anticipation et de prévention des dégradations des copropriétés, la loi n° 2024-322 du 9 avril 2024 visant à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement créé de nouveaux mécanismes et obligations pour les différents acteurs de l’immobilier. Tour d’horizon des nouvelles dispositions en la matière.

 

Anticipation de la dégradation – Administration de la copropriété

Un nouvel emprunt collectif pour le financement de travaux peut être souscrit à la majorité requise, et non plus à l’unanimité, lorsqu’il s’agit, notamment, de travaux nécessaires à la conservation de l’immeuble, à la préservation de la santé des occupants ou rendus obligatoires par des dispositions législatives, réglementaires, ou en vertu d’un arrêté de police administrative.

Les copropriétaires refusant de participer à l’emprunt collectif devront notifier leur choix dans un délai de deux mois suivant la signification du procès-verbal, et verser la totalité de la quote-part du prix des travaux qui leur incombe dans un délai de six mois. En cas de mutation, la charge de la contribution au remboursement de l’emprunt collectif est transférée à l’acquéreur.

Le recouvrement des sommes dues au titre du budget prévisionnel sera réalisable sans qu’il soit nécessaire d’obtenir l’autorisation préalable du juge, et ce dès le défaut de versement d’une seule provision à sa date d’exigibilité.

L’immatriculation de la copropriété auprès de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) doit désormais comprendre les données principales en plus des données essentielles aux fins d’informer les services de l’État des éventuels refus de permis de louer et permettre la mise en œuvre de dispositifs de repérage des copropriétés en difficultés.

Le syndic doit convoquer une assemblée générale dans un délai de deux mois à compter de la première présentation de la lettre recommandée du conseil syndical demandant la résiliation du contrat de syndic. A défaut, l’assemblée pourra être convoquée directement par le président du conseil syndical.

La loi impose par ailleurs la généralisation des notifications et mises en demeure par voie électronique sans que l’accord des copropriétaires ait à être recueilli. A compter de ce jour, les copropriétaires doivent expressément manifester leur volonté de maintenir la réception de ces documents par voie postale.

 

Administration d’une copropriété en difficulté

Les différentes procédures de prévention et de traitement des difficultés d’une copropriété sont modifiées de la manière suivante :

  • La désignation du mandataire ad hoc au cours de la procédure d’alerte pourra être réalisée dès lors que l’approbation des comptes n’aura pas été votée depuis au moins deux ans par l’assemblée générale des copropriétaires ;
  • La désignation de l’administrateur provisoire emporte interdiction de diligenter une procédure d’exécution sur les sommes versées à la Caisse des dépôts et consignations par l’administrateur dans le cadre de sa mission ;
  • Une demande de communication des comptes au cours de la procédure de carence par un l’expert restée veine dans un délai de deux mois, présage d’une présomption simple de graves difficultés financières.

Un syndic d’intérêt collectif, ayant pour mission de gérer les copropriétés et d’assister l’administrateur provisoire, pourra être désigné pour une durée de 5 ans par le préfet du département.

Le retrait d’une copropriété en difficulté existant au sein d’une union de syndicats peut désormais être décidé à la majorité de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965 et non plus à celle de l’article 26.

En ce sens également, une nouvelle procédure de scission judiciaire est instaurée et pourra être sollicitée par l’opérateur dans deux cas :

  • Si l’immeuble est situé dans le périmètre d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat (OPAH) ou d’une opération de requalification des copropriétés dégradées (ORCOD) ;
  • Si la préconisation du plan de sauvegarde invitant à la scission n’a pas été suivie.

 

Gestion des copropriétés en difficultés – Information et relogement des occupants

La révélation d’une procédure menant à la prise d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité a désormais vocation à être davantage étendue. En effet, l’autorité compétente doit désormais informer les occupants de l’engagement de la procédure contradictoire par courrier ou remise contre signature ou encore par affichage sur la façade de l’immeuble.

Ces mêmes occupants sont désormais protégés en cas d’interdiction temporaire d’habitation du logement depuis plus de 3 ans ; le propriétaire devant alors assurer leur relogement.

La protection des occupants permettant une suspension du loyer est étendue aux locaux à usage professionnel ou commercial dès lors que l’immeuble est frappé d’un arrêté de police, de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité.

 

Lutte contre les marchands de sommeil

L’absence de rédaction d’un contrat de bail ou de délivrance d’un reçu ou d’une quittance par le bailleur, est puni d’un an d’emprisonnement et de 20.000 euros d’amende.

En outre, les sanctions pénales des marchands de sommeils sont renforcées en ce que la peine d’emprisonnement est aujourd’hui portée à 7 ans et 200.000 euros d’amende (contre 5 ans et 150.000 euros auparavant). En ce sens, le bulletin n° 2 du casier judiciaire des personnes morales est désormais consultable par l’Association pour le développement du service notarial.

 

Autorisation préalable de mise en location

Les conditions de délégation de la gestion des permis de louer sont désormais assouplies. Un droit de visite, lors de la phase d’instruction d’une demande d’autorisation préalable à la mise en location, est possible pour le Président de l’Établissement public de coopération intercommunale compétent ou pour le maire, et ce dans un délai d’un mois à compter du dépôt de la demande.

Ces organes sont également compétents aux fins de prononcer et recouvrer les amendes relatives aux locations réalisées en contravention du permis de louer.

Dossier de diagnostics techniques complété en cas de cession d’un bien immobilier

Depuis le 11 avril 2024, le dossier de diagnostics techniques en cas de vente doit désormais faire mention des arrêtés pris au titre de la police de la sécurité et de salubrité des immeubles, locaux et installations sur les parties privatives sous peine de résolution du contrat.

 

Diagnostic structurel

Le nouvel article L. 126-6-1 du Code de la construction et de l’habitation permet aux communes de définir des secteurs au sein desquels tout bâtiment d’habitation collectif doit faire l’objet, 15 ans après la réception des travaux de construction du bâtiment et au moins une fois tous les 10 ans, d’un diagnostic structurel mentionnant les désordres observés portant atteinte à la solidité et évaluant les risques pour les occupants.

Cette obligation étant satisfaite pour les immeubles en copropriété à usage d’habitation par l’élaboration du plan pluriannuel de travaux.

 

Outils des collectivités en matière d’opération d’aménagement de l’habitat dégradé

L’objet des opérations de restauration immobilière (ORI) est désormais étendu en ce qu’elles peuvent avoir pour objectif de diligenter des travaux de rénovation énergétique, de salubrité, d’habitabilité et de sécurité des occupants en sus des interventions concernant la réhabilitation et la démolition.

Le régime de la concession d’aménagement est désormais étendu au traitement des copropriétés dégradés.

Le régime de la prise de possession applicable aux opérations de requalification des copropriétés dégradées d’intérêt national (ORCOD-IN) est étendu aux ORCOD de droit commun qui peuvent aujourd’hui inclure des monopropriétés.

La présente loi étend l’utilisation et la délégation du droit de préemption urbain dans les opérations de traitement des copropriétés au concessionnaire d’une opération d’aménagement ou au titulaire d’une concession pour le traitement des copropriétés dégradées et ainsi portées sur des aliénations par principe non autorisées visées à l’article L. 211-4 du Code de l’urbanisme.

Une dispense d’autorisation d’urbanisme est instaurée pour les constructions temporaires et démontables ayant vocation à héberger temporairement les occupants délogés dans le cadre d’opération de réhabilitation de copropriété dégradées.

Le dispositif introduit à titre expérimental par la loi ALUR, octroyant une possibilité d’expropriation des parties communes, voit sa durée prolongée de dix années supplémentaires.

Enfin un régime dérogatoire d’expropriation est créé. Celui-ci aura vocation à s’appliquer aux immeubles dégradés à titre remédiable dès lors que :

  • L’immeuble aura fait l’objet d’au moins deux arrêtés de périls non exécutés intégralement dans les 10 dernières années ;
  • L’immeuble nécessitera des mesures de remise pour prévenir sa dégradation ;
  • Qu’un plan de relogement sera établi.

 

Loi n° 2024-322 du 9 avril 2024 visant à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement, JO du 10 avril 2024

 




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Compétences
  • Développement immobilier
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