Cheuvreux Paris

La procédure du tiers demandeur à l’aune de la loi industrie verte

24 Nov 2023 Newsletter

Le dispositif du tiers demandeur s’inscrit dans la volonté de libérer du foncier, de favoriser la reconversion des friches et des sites industriels et devait permettre de « débloquer » une ressource foncière considérable. Ce nouvel acteur dans la gestion des sols pollués s’est fait une place dans le Code de l’environnement à l’article L. 512-21 par la loi ALUR du 24 mars 2014.

L’exploitant d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) est tenu, lors de la cessation d’activité, de remettre le site en l’état en fonction d’un usage déterminé par les dispositions du Code de l’environnement. La charge financière de cette remise en état est soumise à une prescription trentenaire à partir de la date à laquelle la cessation d’activité de l’ICPE a été portée à la connaissance de l’administration (CE 8 juillet 2005, n° 247976).

Précisons qu’en cas de danger pour la sécurité, la santé et la salubrité publiques, l’État peut prescrire à tout moment – même au-delà de la prescription trentenaire – des mesures de remise en état. Autrement dit, l’obligation de remise en état est quasi-imprescriptible alors que la charge financière incombant au dernier exploitant attachée à la remise en état est soumise à ladite prescription. Cette prescription, ne pouvant être écartée par les dispositifs classiques d’exclusion ou de partage de responsabilité dans le cadre de contrat de droit privé, entraîne la crainte de certains exploitants de voir leur responsabilité engagée ; ils préfèrent alors parfois « geler » le site support de l’ICPE plutôt que de le valoriser.

C’est notamment sur la base de ce constat qu’en 2014, est entré dans la danse un nouvel acteur : le tiers demandeur. Ce dispositif s’inscrit dans la volonté de libérer du foncier, de favoriser la reconversion des friches et des sites industriels et devait permettre de « débloquer » une ressource foncière considérable. Ce nouvel acteur dans la gestion des sols pollués s’est fait une place dans le Code de l’environnement à l’article L. 512-21 par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 dite loi ALUR.

La procédure dite du « tiers demandeur » codifiée aux articles R. 512-76 à R. 512-81 du même code, permet de transférer l’obligation de remise en état pesant sur le dernier exploitant à un tiers intéressé. Lors de la mise à l’arrêt définitif de l’installation ou par la suite, un tiers intéressé – précisément toute personne publique ou privée – peut demander au représentant de l’État dans le département de se substituer à l’exploitant, avec son accord, afin de réaliser les travaux de réhabilitation en fonction de l’usage que ce tiers envisage pour le terrain concerné. Ce dispositif présente des avantages pour le tiers intéressé, avec, notamment un gain de temps, la procédure permettant d’engager la réhabilitation du site support de l’ICPE vers l’usage souhaité par le tiers sans passer au préalable par l’usage défini dans les conditions fixées au Code de l’environnement qui s’impose au dernier exploitant.

Sans entrer dans le détail de la procédure y attachée, notons que le tiers demandeur doit notamment transmettre un mémoire de réhabilitation au représentant de l’État dans le département, définissant les mesures permettant d’assurer la compatibilité entre l’usage futur envisagé et l’état des sols. En sus, il doit également disposer de capacités techniques suffisantes et de garanties financières couvrant la réalisation des travaux. En cas de défaillance du tiers demandeur et de l’impossibilité de mettre en œuvre lesdites garanties, le dernier exploitant devra mettre en œuvre la réhabilitation pour l’usage défini dans les conditions fixées au Code de l’environnement. Notons que cette obligation de réaliser la réhabilitation en cas de défaillance du tiers intéressé peut constituer un frein pour les exploitants qui souhaiteraient s’engager dans le dispositif.

Cette procédure créée en 2014, entrée en vigueur en 2015, a fait rapidement l’objet d’une modification aux termes du décret n° 2017-1456 du 9 octobre 2017 qui a simplifié les obligations en termes de garanties financières.

Près de 8 ans après son entrée en vigueur et bien que la procédure ait été initiée pour environ 140 dossiers de cessation d’activité qui ont donné lieu à 80 arrêtés préfectoraux de substitution[1], certains obstacles pourraient être levés pour lui permettre une pleine efficacité. C’est ce qu’a prévu la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte.

L’étude d’impact de ladite loi confirme la réticence des exploitants à entrer dans le dispositif puisque ces derniers conservent l’obligation de remise en état en cas de défaillance du tiers demandeur (V. supra). De leur côté, les tiers demandeurs souhaiteraient pouvoir intervenir sur le site dès la cessation de l’activité en se substituant à l’exploitant dès la mise en sécurité du site.

La loi Industrie verte, dont l’objet est notamment d’accélérer et de faciliter le renouvellement et la réhabilitation des fonciers industriels pour des sites en fin d’activité ou d’ores et déjà en cessation, prenant en compte ces retours d’expérience, est venue apporter des modifications notables à cette procédure en vue de l’améliorer.

L’article L. 512-21 du Code de l’environnement, socle législatif du dispositif, est modifié :

  • Le tiers intéressé pourra demander au représentant de l’État dans le département de se substituer à l’exploitant, dès la notification de cessation d’activité. Rappelons qu’avant cette modification, la demande s’effectuait lors de la mise à l’arrêt définitif d’une ICPE.
  • Le tiers intéressé pourra également réaliser une demande de substitution à l’exploitant concernant tout ou partie des mesures de mise en sécurité du site et non plus seulement concernant la réhabilitation.
  • Le tiers intéressé pourra également demander au représentant de l’État l’autorisation de se substituer à l’exploitant par anticipation en cas de future cessation d’activité.
  • En cas de défaillance du tiers demandeur et de l’impossibilité de mettre en œuvre les garanties financières, le dernier exploitant sera désormais uniquement responsable de la mise en sécurité du site et non plus de la réhabilitation du site. Cette modification est à souligner puisqu’elle devrait permettre de convaincre les exploitants réticents en supprimant le risque de devoir réaliser la remise en état, souvent coûteuse.

L’objectif de ces apports est de permettre une meilleure rotation et réutilisation des fonciers afin d’accueillir de nouvelles implantations industrielles ou de nouveaux usages comme du logement, tout en définissant clairement les responsabilités de chacun. Ces modifications ne manqueront pas d’offrir un gain de temps aux tiers intéressés et devraient permettre de convaincre les plus hésitants à s’engager dans le dispositif.

 

Sévérine Lebovici, notaire associée et Bérénice Robine, juriste Lab

 

 

[1] Etude d’impact projet de loi industrie verte, NOR : ECOX2310860L/Bleue-1




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