Conformément aux dispositions du Code de l’environnement, lorsque l’exploitant d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) cesse son activité, il devra respecter l’ensemble de la procédure de cessation prévue, notamment s’agissant de la remise en état du site. En l’absence du dernier exploitant, le propriétaire pourra être tenu pour le redevable des obligations environnementales à condition qu’il soit démontré qu’il a fait preuve de négligence ou qu’il n’est pas étranger à la pollution en cause. Fidèle aux principes de responsabilité précités, la Cour de cassation précise dans le cas d’un bail commercial dont le renouvellement est refusé par le bailleur que les obligations environnementales incombent toujours au dernier exploitant, preneur à bail.
Dans l’espèce concernée, l’établissement public Saint-Ouen habitat public a notifié le 29 mai 2009 à la société Total marketing services, devenue la société Total énergie marketing services, un congé à effet au 31 décembre 2009 avec refus du renouvellement du bail commercial consenti à compter du 1er décembre 1970 pour l’exploitation d’une station-service de distribution de produits pétroliers et vente d’accessoires automobiles.
La locataire a assigné l’établissement public bailleur en paiement d’une indemnité d’éviction par acte du 30 décembre 2011. L’EPIC et la société d’économie mixte de construction et de rénovation de la ville de Saint-Ouen ont formé un pourvoi contre l’arrêt du 8 juillet 2020 rendu par la Cour d’appel de Paris retenant que les frais de mise en sécurité ou de dépollutions et éventuellement de retrait des réservoirs sont directement liés à l’éviction avec l’arrêt de l’exploitation.
En effet, la Haute Cour invitée à se prononcer sur la question de savoir si les frais de dépollution devaient être inclus dans l’indemnité d’éviction due au preneur à bail à la suite d’un refus de renouvellement de bail commercial, précise tout d’abord qu’au regard de l’article L. 512-12-1 du Code de l’environnement, de l’arrêté du 22 juin 1998 relatif aux réservoirs enterrés de liquides inflammables ou combustibles et de leurs équipements annexes et de l’arrêté du 15 avril 2010 relatif aux prescriptions générales applicables aux stations-services relevant du régime de l’enregistrement, « le preneur à bail dont le renouvellement est refusé, dernier exploitant d’une installation classée pour la protection de l’environnement, est tenu de prendre toutes les dispositions utiles pour la mise en sécurité du site et, s’agissant des réservoirs de carburant et de leurs équipements annexes de les neutraliser ».
Dès lors, « l’obligation particulière de dépollution du site d’une installation classée pour la protection de l’environnement doit, à l’arrêt définitif de l’exploitation, être exécutée par le dernier exploitant, qui en est seul tenu, indépendamment de tout rapport de droit privé ».
Autrement dit, les coûts de mise en sécurité ou de dépollution et éventuellement le retrait des réservoirs doivent être exclus de l’indemnité d’éviction due au preneur à bail en cas de refus de renouvellement dans la mesure où la dépollution du site appartient à l’exploitant au regard de ses obligations environnementales.
Cette décision s’inscrit dans la lignée jurisprudentielle rendue en la matière en étendant la solution retenue dans l’arrêt du 11 mai dernier de la Cour de cassation (Cass, 3ème civ. 11 mai 2022, n° 21-16.348 – lire notre actualité Cheuvreux) qui précisait que dans le cas d’un bail commercial, l’intention du bailleur de reprendre l’activité apparait « sans incidence sur l’obligation légale particulière de mise en sécurité et de remise en état du site pesant sur le dernier exploitant » et de ce fait « l’obligation de remettre le site en état s’imposait au locataire exploitant ayant mis fin à l’installation définitif ».