Document à la fois stratégique et opérationnel, le Plan Local d’Urbanisme (PLU), qui a remplacé progressivement le Plan d’Occupation des Sols (POS) depuis la loi SRU, s’est enrichi au fil des années pour répondre à de nouveaux enjeux. Il est aujourd’hui le pivot de la planification urbaine.
Néanmoins, on constate une profonde mutation de l’outil, tourné désormais davantage vers la transformation et la végétalisation plutôt que vers la construction. Pour autant, il sera toujours nécessaire de produire du logement pour répondre aux besoins qui ne cessent d’augmenter. Dès lors, il est temps de réinventer ce document d’urbanisme pour imaginer et construire la ville de demain.
Le dossier « Réinventons le PLU » interroge les outils existants – les orientations d’aménagement et de programmation, les dérogations, les destinations, l’unité foncière etc. – et passe au crible le Code de l’urbanisme afin de déterminer s’il permet encore de répondre de manière satisfaisante aux enjeux actuels. Il présente également de nouvelles idées telles que le PLU bioclimatique ou l’Urbascore.
Les plans locaux d’urbanisme face aux nouveaux enjeux de la transformation des villes et des territoires
Michèle Raunet
La loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain institue le plan local d’urbanisme (PLU), qui remplace le plan d’occupation des sols (POS). C’est un document opérationnel mais aussi stratégique. Outre le droit des sols, il définit le projet global d’aménagement de la commune. Les rédacteurs des PLU se trouvent donc à la croisée des chemins : ils doivent permettre à la ville de se développer tout en préservant la nature, ou encore la non-artificialisation des sols. Le Code de l’urbanisme permet-il encore de répondre aux enjeux ?
Le PLU est-il encore un instrument de planification adapté aux enjeux contemporains ?
Sébastien Harlaux et Guillaume Hébert
Le plan local d’urbanisme (PLU) est un outil vieux de vingt ans. Il remplace, depuis la loi dite « SRU » du 13 décembre 2000, les plans d’occupations des sols (POS). Le PLU porte l’ambition de mettre en œuvre la ville de demain : plus verte, plus proche des attentes des habitants, plus respectueuse du climat. Cependant l’élaboration d’un PLU est un exercice long et très contraint juridiquement. Dès lors, il peut y avoir un écart important entre les attentes et les impératifs, et le contenu du PLU. Comment, dans ce contexte, le PLU peut-il rester opérant ?
Les orientations d’aménagement et de programmation du PLU : une autre approche de l’urbanisme, quoi qu’il en coûte
Soazic Marie
La loi Climat et Résilience du 22 août 2021 a confirmé que les orientations d’aménagement et de programmation (OAP) du plan local d’urbanisme (PLU) prennent une place de plus en plus importante à côté du règlement. Si cette loi les mobilise plus particulièrement, en vue de la lutte contre l’artificialisation des sols, leur utilisation peut être stratégique pour relever d’autres défis majeurs du droit de l’urbanisme, environnementaux comme sociétaux. Elles traduisent une nouvelle approche de la matière, au prix toutefois d’une perte de lisibilité des règles d’urbanisme et, de ce fait, d’une certaine sécurité juridique.
Plan local d’urbanisme et dérogations multiples
Rozen Noguellou
Alors que les dérogations étaient pensées, il y a encore quelque temps, comme des exceptions aux principes, leur généralisation laisse penser qu’il y a des exceptions aux principes posés par les plans locaux d’urbanisme (PLU). Quel enseignement tirer de cette profusion de dérogations ?
Le bâti existant, le grand oublié de la rédaction des plans locaux d’urbanisme
Laetitia Santoni
La ville est un organisme vivant, qui se modifie, se transforme, se renouvelle. Toutes les villes sont le résultat d’adaptations successives. Après l’urbanisme d’extension urbaine, les auteurs des plans locaux d’urbanisme (PLU) ont désormais à prendre à bras-le-corps l’urbanisme de la transformation. Or, bien que le renouvellement urbain dispose d’une reconnaissance théorique et pratique depuis plus de vingt ans et que tout un chacun reconnaisse la nécessité de permettre l’évolution de l’existant, les PLU restent principalement rédigés pour réglementer la réalisation de constructions nouvelles. En l’absence de dispositions dédiées, le droit de l’urbanisme s’adapte avec difficulté aux besoins des interventions sur l’existant, en particulier au regard des nouveaux enjeux qui lui sont assignés.
Destinations : les PLU sont-ils bien outillés pour favoriser et encadrer les nouveaux usages ?
Malicia Donniou et Anna Berz
Après le développement exponentiel des locations meublées touristiques des plates-formes type Airbnb et face à l’apparition de nouveaux usages dans la ville, tels que les « dark kitchens » et les « dark stores », la logistique du « dernier kilomètre », ou encore le « coliving » et le « coworking », la question peut se poser de savoir si le régime des destinations ne serait pas déjà en partie obsolète. Ce régime juridique, qui a fait l’objet d’une réforme en 2015 et commence seulement à prendre son essor dans les plans locaux d’urbanisme (PLU), notamment bioclimatiques, va également devoir s’adapter aux usages qui ne manqueront pas d’émerger avec les nouvelles manières de vivre la ville.
L’adaptation des PLU au changement climatique : vers la fin des temps « hypermodernes » ?
Ophélie Bainville
Trouver le point d’équilibre entre « accepter l’obsolescence définitive de secteurs urbanisés », selon la formule de Sylvain Grisot et les rendre à la nature et maintenir de l’attractivité et de la désirabilité des territoires, au moyen de règles d’urbanisme incitatives et respectueuses de l’intensité urbaine et de la qualité du cadre de vie : c’est le pari risqué que prend la loi Climat et Résilience du 22 août 2021 (nº 2021-1104). Celle-ci fait, entre autres, entrer, dans les documents de planification et d’urbanisme, les objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et d’adaptation des territoires littoraux au recul du trait de côte. Reprenant l’expression du philosophe Gilles Lipovetsky, allons-nous vers la fin des temps « hypermodernes » ?
Solidarité et mutualisation, nouveau cadre pour agir en ville
Dominique Alba, Paul Baroin et Michèle Raunet
Si planifier la ville est une permanence historique, les règles actuelles sont issues du grand besoin de construction et de reconstruction des années 1950 et 1960 après la Seconde Guerre mondiale et la montée en puissance de l’industrialisation. Elles ont accompagné la densification des villes. Ces règles sont encore aujourd’hui orientées vers la construction. Elles s’appliquent toujours à la parcelle et respectent strictement le droit de la propriété. Mais, face à l’urgence climatique et aux évolutions des usages, il est nécessaire d’aller au-delà de la parcelle pour créer une solidarité entre les bâtiments. Procéder ainsi nécessite d’inventer un cadre normatif, réglementaire et juridique solidaire qui promeuve une approche multiparcelles.
L’Urbascore : faire de la ville un « bien commun »
Emmanuel Grégoire et Charles-Antoine Depardon
La Ville de Paris fait le constat qu’il est difficile aujourd’hui de développer de nouveaux projets d’urbanisme dans une ville dense et constituée comme la capitale. Pourtant, c’est justement dans ce cadre urbain que les projets les plus vertueux sont les plus efficaces, car ils bénéficient à un grand nombre de riverains. Dès lors, la promotion des externalités positives des projets urbains constitue une étape pour la reconnaissance des biens communs. C’est à la suite de ce constat que la Ville de Paris, dans le cadre de la révision de son plan local d’urbanisme, a eu l’idée d’imaginer Urbascore, pour favoriser ceux qui contribuent à la transition écologique. Emmanuel Grégoire, premier adjoint à la mairie de Paris, décrypte cette innovation, article co-écrit avec Charles-Antoine Depardon.
Opérations immobilières n° 146-147 – Juin-Juillet 2022, p. 32 [Accès abonnés]