L'arrêt du 2 décembre 2024 du Tribunal des conflits éclaire sur le régime applicable à un bien appartenant à une personne privée grevé d’une servitude de passage pour accéder à un ouvrage public appartenant à une commune et relevant, ainsi, de son domaine public.
En l’espèce, par suite d’intempéries ayant provoqué l’effondrement d’une partie d’un mur de soutènement d’un chemin lui appartenant, un propriétaire poursuit la commune, bénéficiaire d’une servitude de passage sur ce chemin, pour obtenir la prise en charge partielle des travaux de réfection.
Le tribunal judiciaire puis le tribunal administratif s’estimant incompétents, le Tribunal des conflits devait donc déterminer le régime juridique applicable à ce mur de soutènement et ce chemin afin de déterminer le juge compétent.
Pour le Tribunal des conflits, la propriété privée du chemin suffit à rejeter la qualification de domaine public, même si le chemin est utile pour le château d’eau et les autres installations nécessaires au service public de l’alimentation en eau potable et donc au domaine public. Il refuse en conséquence l’application de la théorie de l’accessoire. L’arrêt confirme ainsi la limitation relativement récente de la théorie de l’accessoire, qui ne permet plus, comme cela a pu être le cas dans le passé, de qualifier des biens privés d’ouvrages publics lorsqu’ils étaient nécessaires à un service public.
Concernant la qualification d’ouvrage public, la propriété privée du chemin ne peut, par elle-même, permettre de l’exclure car un ouvrage public peut appartenir à une personne privée. Cela étant, il faut, pour l’admettre, que le bien immobilier appartenant à une personne soit directement affecté à un service public (CE, Ass. 29 avril 2010, n° 323179, Beligaud). Or, en l’espèce, le chemin et le mur ne sont pas incorporés au château d’eau et ne peuvent être regardés comme étant affectés directement au service public de l’alimentation en eau potable ; ils permettent seulement un accès aux ouvrages concernés. Ainsi, ils ne sont pas directement affectés à un service public et ne peuvent être qualifiés d’ouvrage public.
Dès lors, le litige relatif à la prise en charge du coût des travaux de réfection d’un mur de soutènement, dans le cadre d’une servitude de passage établie par acte de droit privé, relève de la compétence du juge judiciaire.