Par une décision en date du 23 mai 2024 publiée au bulletin, la Cour de cassation rappelle le principe édicté par l’article 815-13 du Code civil quant au calcul de la créance dont bénéficie l’indivisaire ayant remboursé les mensualités du prêt en lieu et place de son coindivisaire permettant ainsi le financement de l’immeuble indivis.
Au cas d’espèce, deux concubins procèdent à l’acquisition d’un bien immobilier respectivement dans les proportions suivantes, savoir trois quart et un quart chacun. Des difficultés naissent au moment de la liquidation pour la détermination de la créance de Monsieur par suite de son surfinancement dans les mensualités de prêt acquittées.
Les juges d’appel fixent le montant de la créance de Monsieur à l’égard de Madame en confrontant le montant des paiements réalisés par le demandeur, pour la part incombant à son coindivisaire, à la différence de valeur entre le prix d’acquisition et le montant actuel du bien.
La Cour de cassation vient casser partiellement cet arrêt en ce que la créance dont peut arguer l’un des indivisaires, ne peut l’être qu’à l’encontre de l’indivision et non directement à l’égard du coindivisaire.
Elle rappelle par ailleurs que la créance se détermine par comparaison entre le montant du profit subsistant avec celui de la dépense faite. Le profit subsistant s’établit alors en tenant compte de « la proportion dans laquelle le règlement des échéances de l’emprunt, en capital et intérêts, avait contribué au financement global de l’acquisition, incluant les frais d’acquisition et le coût du crédit, puis d’appliquer cette proportion à la valeur actuelle du bien dans son état au jour de l’acquisition. ».
Si le remboursement de l’emprunt ayant permis l’acquisition de l’immeuble indivis est qualifié de dépense nécessaire à la conservation du bien par une jurisprudence désormais bien établie (Cass. com. 10 février 2015, n° 13-24.659 ; Cass. 1ère civ. 5 juillet 2023, n° 23-70.007), les modalités de son chiffrage sont en revanche, toujours sources de divergence ainsi que le démontre le présent arrêt.
La créance due au titre du remboursement des échéances d’emprunt (en capital et intérêts), se détermine ainsi par comparaison entre la dépense faite et le profit subsistant. Ce dernier, s’il comprend évidemment le montant emprunté englobe également les frais d’acquisition et le coût du crédit. C’est alors cette proportion qu’il convient d’appliquer à la valeur actuelle de l’immeuble.
Il est cependant prudent de rappeler que le juge dispose d’un pouvoir modérateur sur la valorisation de cette créance en ce qu’il statue « en équité » ainsi que le précise l’article 815-13 du Code civil (Cass. 1ère civ. 24 septembre 2014, n° 13-18.197).
En outre, le coindivisaire créancier à l’égard de l’indivision doit garder à l’esprit que sa créance se prescrit par un délai de cinq ans à compter du paiement de chaque échéance, et non à compter du partage (Cass. 1ère civ. 14 avril 2021, n° 19-21.313).
Cass. 1ère civ. 23 mai 2024, n° 22-11.649