Pour faire face aux difficultés d’exécution des contrats de la commande publique en raison de la flambée des prix des matières premières et composants ainsi que des pénuries d’approvisionnement, la « circulaire Castex » publiée le 30 mars 2022, rappelle les solutions pouvant être mises en œuvre. Puis le Conseil d’Etat, saisi par le Gouvernement, a rendu en date du 15 septembre 2022 un avis relatif aux possibilités de modification du prix ou des tarifs des contrats de la commande publique et aux conditions d’application de la théorie de l’imprévision. Tirant les conséquences de cet avis, la Première ministre, Élisabeth Borne, a pris une nouvelle circulaire le 29 septembre 2022, abrogeant celle du 30 mars 2022.
La circulaire expose l’ensemble des solutions envisageables pour apporter une réponse équilibrée aux situations dans lesquelles l’équilibre économique des contrats se trouve bouleversé.
1/ L’obligation de prévoir des prix révisables pour de nombreux marchés publics
La circulaire reprend les articles du Code de la commande publique, rappelle l’obligation de conclure des contrats à prix révisables, notamment pour les marchés ayant pour objet l’achat de denrées alimentaires, d’énergies, et ce à fin d’assurer une relation équilibrée dans les contrats de longue durée entre acheteurs et prestataires.
2/ La possibilité de modifier les seules clauses financières des contrats
La circulaire rappelle qu’il est possible de recourir à une modification des contrats dans les conditions prévues par les dispositions du Code de la commande publique ; lesquelles modifications ne génèrent pas de difficultés lorsqu’elles concernent les spécificités techniques ou les conditions d’exécution nécessitées par le contexte actuel.
Elle précise par la suite, en s’appuyant sur l’avis du Conseil d’État, qu’il est possible de procéder à une renégociation des prix en application des articles R. 2194- 5 ou R. 3135- 5 du Code de la commande publique qui prévoit la possibilité de modifier les contrats lorsque la modification a été rendue nécessaire par des circonstances imprévues.
Nécessairement, elle rappelle que le montant de la compensation ne peut être négocié que s’il permet de poursuivre l’exécution du contrat dans le respect du bon emploi des deniers publics et du principe général interdisant aux personnes publiques de consentir des libéralités.
Enfin elle rappelle que les modifications des contrats en cours ne sont pas de droit pour le cocontractant et ne peuvent être effectuées qu’avec l’accord de l’autorité contractante
3/ Droit du cocontractant à être indemnisé sur le fondement de la théorie de l’imprévision
Le cocontractant de la personne publique qui subit un préjudice du fait de l’exécution du contrat en raison d’un bouleversement temporaire de l’équilibre économique du contrat, peut, sur le fondement de l’article L. 6 du Code de la commande publique, choisir de conclure une convention d’indemnisation, plutôt que de modifier le contrat.
Cette indemnité vise à dédommager partiellement le titulaire du préjudice lorsque le préjudice peut être prouvé.
4/ La possible résiliation amiable du contrat
Ajout par rapport à la circulaire du 30 mars 2022, la circulaire émet la possibilité de résilier le contrat à l’amiable faut d’accord sur les conditions de poursuite du contrat.
5/ Le gel des pénalités contractuelles
La Première ministre, dans sa circulaire, demande que l’exécution des clauses des contrats prévoyant des pénalités de retard ou l’exécution des prestations aux frais et risques de l’entreprise soient suspendues tant que celle-ci est dans l’impossibilité de s’approvisionner dans des conditions normales.
6/ Application de l’article 1195 du Code civil pour les contrats de droit privé
La circulaire admet la possible renégociation des contrats de la commande publique lorsque ceux-ci sont des contrats de droit privés.
Réaffirmant l’exigence que les services de l’État passent des marchés à prix révisables lorsque ceux-ci portent sur des prestations exposées à des aléas économiques majeurs, le texte les engage de nouveau à ne pas appliquer de pénalités lorsque les entreprises se voient empêchées de respecter les délais contractuels en raison des pénuries ou de flambées de prix.
Elle invite aussi les préfets à sensibiliser les collectivités locales et leurs établissements publics à ces règles et à ces principes.
Circulaire n° 6374/SG du 29 septembre 2022 relative à l’exécution des contrats de la commande publique dans le contexte actuel de hausse des prix de certaines matières premières et abrogeant la circulaire n° 6338/SG du 30 mars 2022
CE avis 15 septembre 2022, n° 405540
Fiche technique DAJ MINEFI : Possibilités offertes par le droit de la commande publique de modifier les conditions financières et la durée des contrats de la commande publique pour faire face à des circonstances imprévisibles et articulation avec l’indemnité d’imprévision
Communiqué de presse du Gouvernement n° 159 – 22 septembre 2022