Le Gouverneur de la Banque de France a annoncé le 28 décembre 2022 les taux d’usure applicables à partir du 1er janvier 2023.
Pour rappel, en matière de crédits immobiliers (et de prêts pour travaux d’un montant supérieur à 75.000 €), le taux d’usure s’établit désormais – et jusqu’au 30 mars 2023 – comme suit :
Type de prêt | Taux d’usure applicable au 1er janvier 2023 |
Prêts à taux fixe d’une durée inférieure à 10 ans | 3,41 %
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Prêts à taux fixe d’une durée comprise entre 10 ans et moins de 20 ans | 3,53 % |
Prêts à taux fixe d’une durée de 20 ans et plus | 3,57 %
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Prêts à taux variable | 3,35 %
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Prêts relais | 3,76 % |
Cette mesure vise à trouver une solution aux nombreuses difficultés rencontrées par les particuliers pour l’accès au crédit immobilier ces dernières semaines, compte tenu de la remontée des taux d’intérêt constatée tout au long de l’année qui vient de s’achever.
Dans ce contexte, on peut au moins se réjouir que cette problématique du respect du plafond du taux d’usure ne concerne pas – ou plus précisément ne concerne plus – les prêts professionnels, car depuis la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 a été supprimée la référence au taux d’usure pour les « prêts accordés à une personne morale se livrant à une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale » et pour les prêts accordés aux « commerçants, artisans et entrepreneurs individuels ». Ce qui signifie qu’à l’heure actuelle, pour les professionnels, seuls les découverts en compte restent soumis au respect du taux d’usure.
On peut rappeler à ce sujet que, dans la mesure où la mention du taux effectif global est étroitement liée au taux d’usure – dont elle permet de justifier le non-dépassement –, l’obligation de mentionner le taux effectif global dans les prêts destinés à financer les besoins d’une activité professionnelle apparaît à l’heure actuelle comme une survivance du droit antérieur, dont la pertinence peut être contestée. C’est en ce sens que déjà en 2011, le 107e Congrès des Notaires, consacré au thème du financement, avait inclus dans ses propositions la suppression de la mention du taux effectif global dans les prêts à finalité professionnelle, via une modification des articles L. 313-2 du Code de la consommation et L. 313-4 du Code monétaire et financier, relatifs au TEG.
Cette proposition de réforme s’appuyait sur l’incohérence liée au maintien de l’exigence de TEG alors que les prêts à finalité professionnelle échappent depuis 2003 aux dispositions applicables à l’usure, et sur le fait que, dans ce contexte, la sanction attachée à l’omission d’un TEG ou à son caractère erroné ne se justifie plus en matière de prêt à finalité professionnelle. Il faut ajouter que le non-respect du TEG nourrit un abondant contentieux, alimenté notamment par la complexité des modalités du calcul du TEG et par les incertitudes quant aux éléments à prendre en considération pour son calcul (voir pour un exemple récent, Cass. 1ère civ., 10 novembre 2021, n° 20-14.382). Les notaires du Congrès de 2011 faisaient aussi valoir que les règles de calcul du TEG ne permettent à l’emprunteur ni de mesurer le coût global du crédit ni d’effectuer une comparaison entre différentes propositions de financement. Ils notaient en outre qu’en pratique les acteurs des prêts à finalité professionnelle, qu’ils soient prêteurs, emprunteurs, conseils, considèrent le TEG comme une indication sans réelle portée, et que « les prêts à finalité professionnelle relèvent davantage du domaine de la liberté contractuelle que de celui de l’ordre public de protection, car consentis à des emprunteurs bénéficiant d’une expérience et de conseils avisés lors de la mise en place de ce type de financement » (Actes du 107e Congrès des Notaires, « Le financement », 2011, 3e Commission, « Développer », p. 604).
Il est permis de penser que ces raisons invoquées par le notariat en faveur de l’abolition de l’exigence de la mention du TEG dans les crédits professionnels ne sont pas moins vraies aujourd’hui, et qu’au contraire le contexte macro-économique, et les exigences pressantes de financement de l’économie, semblent militer plus encore en faveur de cette solution !