La présente affaire offre une illustration intéressante des limites à l’encadrement de l’installation des meublés de tourisme pouvant être posées par les agglomérations en vue de lutter contre l’aggravation du déficit de l’offre de logement sur leur territoire causé par le phénomène « Airbnb ».
En l’espèce, la communauté d’agglomération du Pays Basque, se fondant sur les dispositions de l’article L. 631-7 du Code de la construction et de l’habitation, a souhaité renforcé la réglementation de l’usage des locaux d’habitation au sein de ses 22 communes membres afin de mieux maîtriser le volume de meublés de tourisme présents sur son territoire.
A cet effet, par délibération de son conseil communautaire en date du 5 mars 2022, la communauté d’agglomération a approuvé un nouveau règlement encadrant l’usage des locaux d’habitation prévoyant notamment en son article 3 de conditionner la délivrance de l’autorisation préalable de changement d’usage de locaux d’habitation en meublés de tourisme au principe de la compensation en nature, lequel consiste en la transformation concomitante en habitation de locaux (i) ayant un autre usage depuis au moins cinq (ii) situés dans le quartier ou la commune concernée et (iii) proposant une surface de plancher au moins équivalente, (iv) à l’exclusion des locaux commerciaux situés au rez-de-chaussée.
Plusieurs sociétés et une association ont alors demandé au Tribunal administratif de Pau, statuant en référé, de suspendre ledit règlement compte tenu des doutes sérieux quant à sa légalité ressortant notamment du caractère disproportionné des mesures de compensation imposées par rapport à l’objectif poursuivi et à l’atteinte conséquente portée au droit de propriété.
Par une ordonnance du 3 juin 2022, les juges des référés ont fait droit à cette demande en suspendant l’exécution de la délibération litigieuse jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur sa légalité.
A titre principal, le Tribunal administratif reproche à la communauté d’agglomération d’avoir assorti les autorisations de changement d’usage des locaux d’habitation en meublés de tourisme de mesures de compensation trop restrictives, portant ainsi une atteinte disproportionnée au droit de propriété. En effet, en l’espèce, la rareté, voire l’inexistence des locaux éligibles à la compensation dans certaines communes de l’agglomération – résultant en partie du fait que le règlement a écarté la possibilité de transformer les locaux commerciaux situés en rez-de-chaussée au titre de la compensation – rendaient de fait l’obligation de compensation en nature très difficilement accessible aux propriétaires. Partant, les dispositions du règlement méconnaissent le principe de proportionnalité tel qu’interprété par la CJUE dans son arrêt du 22 septembre 2020, étant précisé que si la communauté d’agglomération a fait valoir à l’instance la possibilité de mettre en œuvre cette obligation de compensation par des cessions de commercialité, cette option ne figure pas dans le règlement approuvé et n’est donc pas opposable.
Par ailleurs, les juges de référés estiment que l’application de la nouvelle réglementation dans un délai court – dès le 1er juin – et sans mesure transitoire méconnait le principe de sécurité juridique vis-à-vis des personnes morales exerçant l’activité de location de meublés de tourisme à titre professionnel, lesquels n’étaient pas soumis jusqu’à la date d’approbation du règlement à un quelconque régime d’autorisation.