Le droit français offre traditionnellement un large accès à la justice aux associations constituées en vue de défendre des intérêts collectifs. En matière d’autorisation d’urbanisme, une limite significative à ce droit au recours étendu offert aux associations – notamment celles de défense de l’environnement - est toutefois introduite à l’article L. 600-1-1 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi ELAN, en vue de lutter contre les recours dilatoires et abusifs.
Cet article prévoit depuis lors qu’une association n’est recevable à agir contre une décision relative à l’occupation ou l’utilisation des sols, que si le dépôt des statuts de l’association en préfecture est intervenu au moins un an avant l’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. A noter que la rédaction initiale de cette disposition exigeait l’antériorité de l’association pour pouvoir exercer le droit au recours, mais sans imposer ce délai d’un an.
En réponse à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par le Conseil d’État, portant spécifiquement sur les termes « au moins un an » figurant à l’article L. 600-1-1 du code de l’urbanisme, le Conseil constitutionnel déclare, dans une décision du 1er avril 2022, la disposition litigieuse conforme à la Constitution en tant que ces dispositions ne portent pas d’atteinte disproportionnée au droit à un recours juridictionnel effectif, et ne méconnaissent pas non plus la liberté d’association, ni le principe d’égalité devant la loi, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit.
Le raisonnement du Conseil constitutionnel repose
- d’une part, sur les motifs ayant présidé à l’adoption de l’article L. 600-1-1 du code de l’urbanisme, à savoir d’éviter que la création d’associations aux seules fins de s’opposer à une décision individuelle d’occupation ou d’utilisation des sols fasse peser des risques particuliers d’incertitude juridique;
- d’autre part, sur un encadrement strict de la limitation du droit au recours qui ne concerne que les associations dont les statuts ont été déposés moins d’un an avant l’affichage de la demande du pétitionnaire et est limitée aux seules décisions individuelles relatives à l’occupation ou à l’utilisation des sols.
Cette décision s’inscrit dans la lignée jurisprudentielle de la Haute Cour, ayant déjà eu l’occasion de se prononcer en ce sens à propos d’un dispositif comparable tendant à interdire aux associations créées après l’affichage de la demande en mairie de déposer un recours contre l’autorisation d’urbanisme délivrée (Cons. Constit. 17 juin 2011, décision QPC n° 2011-138).
Cons. const. n° 2022-986 QPC du 1er avril 2022, Assoc. La Sphinx