Très attendue, l’annonce des lauréats de la 2ème édition des appels à projets pour le recyclage du foncier dans le cadre de projets d'aménagement urbain, de revitalisation des cœurs de ville et de périphérie urbaine (AAP) sera faite le 10 novembre 2021.
S’articulant avec les 60 M€ consacrés à l’appel à projet national pour la reconversion des friches polluées issues des anciens sites industriels ICPE ou miniers lancés par l’ADEME, une enveloppe de 589 M€ (dont près de 290 M€ ont déjà été attribués lors de la 1ère édition clôturée en mars 2021) a été allouée à ces AAP pilotés par les Préfets de région. Entièrement territorialisée, cette enveloppe est répartie entre les différentes régions (pour la 2ème édition de l’ AAP : Auvergne-Rhône-Alpes : 36,5 M€, Bretagne : 15,6 M€, Centre-Val-de-Loire : 3 M€, Grand Est : 21,1 M€, IDF : 36,5 M€, Nouvelle-Aquitaine : 29,5 M€, PACA : 24,8 M€, etc.) pour financer la réutilisation des friches et répondre aux deux objectifs portés par l’Etat :
- d’une part, contribuer à la dynamisation et à la relance de l’activité économique, objectifs du plan France Relance ;
- d’autre part, contribuer à la lutte contre l’artificialisation des sols inscrite dans le Plan Biodiversité de 2018. Sont ainsi considérés comme une friche éligible aux AAP :
- un terrain nu, déjà artificialisé et qui a perdu son usage ou son affectation. Est considéré comme artificialisé un sol dont l’occupation ou l’usage affectent durablement tout ou partie des fonctions. N’est pas considéré comme artificialisé un sol de pleine terre ;
- un îlot d’habitat, d’activité ou mixte, bâti et caractérisé par une importante vacance ou à requalifier. Est considéré comme devant être requalifié un îlot d’habitat avec soit une concentration élevée d’habitat indigne et une situation économique et sociale des habitants particulièrement difficile, soit une part élevée d’habitat dégradé vacant et un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements. Pour les îlots d’activité, est considéré comme devant être requalifié tout îlot commercial et économique monofonctionnel, faisant face au vieillissement de ses actifs et à une perte d’attractivité.
Cette démarche s’effectue dans l’esprit de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effet, qui a inscrit la lutte contre l’artificialisation des sols et l’atteinte du « Zéro Artificialisation Nette » parmi les objectifs à atteindre en matière d’urbanisme (article L. 101-2, 6° bis du Code de l’urbanisme).
Par l’optimisation de la densité des espaces urbanisés et la maîtrise de l’étalement urbain (article L. 101-2-1 du Code de l’urbanisme), la réutilisation des friches concourt à la réalisation de l’objectif ZAN en réduisant la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers.
Il conviendra toutefois de s’assurer que les sites retenus dans le cadre des AAP répondent à la définition des friches inscrite à l’article L. 111-26 du Code de l’urbanisme par la loi Climat et résilience : « (…) on entend par « friche » tout bien ou droit immobilier, bâti ou non bâti, inutilisé et dont l’état, la configuration ou l’occupation totale ou partielle ne permet pas un réemploi sans un aménagement ou des travaux préalables. (…) ».
De cette qualification, dépendra en effet la possibilité d’invoquer les dispositions favorables à la réutilisation des friches introduites par la loi Climat et résilience, parmi lesquelles :
- l’article L. 152-6-2 du Code de l’urbanisme qui précise que les projets de construction ou de travaux réalisés sur une friche au sens de l’article L. 111-26 peuvent être autorisés à déroger aux règles relatives au gabarit, dans la limite d’une majoration de 30 % de ces règles, et aux obligations en matière de stationnement, lorsque ces constructions ou travaux visent à permettre le réemploi de ladite friche.
- Le recours au certificat de projet (article 212 de la loi Climat et résilience) qui pourra être établi par le préfet et pour les projets intégralement situés sur une friche au sens de l’article L. 111-26 et soumis, pour leur réalisation, à une ou plusieurs autorisations au titre du Code de l’urbanisme, du Code de l’environnement, du Code de la construction et de l’habitation, du Code rural et de la pêche maritime, du Code forestier, du Code du patrimoine, du Code de commerce et du Code minier. Ce certificat de projet est créé à titre expérimental et pour une durée de 3 ans. A l’instar du certificat d’urbanisme, il aura une fonction d’information (quant aux règles, procédures, délais d’instruction applicables au projet …) et lui seront associés les effets attachés au certificat d’urbanisme conférant ainsi à son bénéficiaire des droits acquis puisque les demandes d’autorisation d’urbanisme déposées dans les 18 mois de la délivrance du certificat seront instruites suivant les règles applicables à cette même date de délivrance.
La volonté marquée de poursuivre l’identification des friches, par la mise en place de bases de données recensant les friches et par le développement des outils de connaissance du foncier par le Cerema afin d’appuyer les collectivités et opérateurs dans l’inventaire des friches et dans la mise en œuvre opérationnelle des projets (1M€ du « fonds friches » du plan France Relance), démontre la volonté forte de développer leur réemploi et leur réhabilitation pour atteindre l’objectif ZAN. A titre d’illustration, peuvent être cités :
- La base de données « Cartofriches » accessible via le portail de l’artificialisation des sols ;
- Le recensement en Ile-de-France, par l’Institut Paris Région à la demande de la Région Ile-de-France, de plus de 2700 friches totalisant 4700 hectares (l’équivalent de près de la moitié de la surface de Paris) ;
- La création des observatoires de l’habitat et du foncier (article L. 302-1, III alinéa 3 du CCH) qui ont pour objet d’analyser la conjoncture des marchés foncier et immobilier et de l’offre foncière disponible notamment en recensant les friches constructibles. Cette analyse prend également en compte les inventaires, prévus à l’article L. 318-8-2 du CCH, des zones d’activité économique (ZAE), dont la définition est donnée à l’article L. 318-8-2 du CCH par renvoi aux compétences des collectivités au sein du CGCT et à l’objet de ces zones.
La réhabilitation des friches polluées nécessite en outre de clarifier certaines notions comme celle d’usage et de réhabilitation, ce que s’est également employée à faire la loi Climat et résilience en définissant ces notions dans le nouvel article L. 556-1 A du Code de l’environnement.
L’annonce par le Président de la République, lors du discours de clôture de la quatrième rencontre nationale « Action cœur de ville » en septembre dernier, de la pérennisation du « fonds friches », sans doute jusqu’à l’horizon 2026, l’adoption par la Commission européenne du Plan d’action de l’Union Européenne « Vers une pollution zéro dans l’air, l’eau et les sols » ainsi que la volonté de celle-ci de mettre en place des actions axées sur le recensement et l’assainissement des sites contaminés en vue de les assainir et de réduire, d’ici 2050, la pollution à des niveaux non nuisibles pour la santé humaine et les écosystèmes naturels, démontrent l’enjeu majeur que constitue le réemploi des friches dans les années à venir.