Suite et fin de la saga judiciaire de l’affaire dite « Maison de poésie » ayant acté de la possibilité de constituer des droits réels spécifiques (dénommés Droits réels de jouissance spéciale « DRJS »), autres que ceux qui sont énoncés à l’article 543 du Code civil ou qui procèdent d’une loi spéciale, avec un arrêt du 6 avril 2023 rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation.
Saisie en appel de la décision rendue par la Cour d’appel de Paris dans un arrêt en date du 7 mai 2021 (CA Paris, pôle 4, ch. 3, 7 mai 2021, n° 19/07600), la haute juridiction judiciaire considère que « Par une interprétation nécessaire et exclusive de dénaturation, la cour d’appel a souverainement retenu que la convention, en prévoyant un droit de jouissance ou d’occupation par la Maison de poésie et par elle seule, offrait une alternative à la fondation qui avait la possibilité soit d’occuper elle-même les locaux soit d’en jouir en en percevant les fruits que constituent les loyers, la condition d’exclusivité imposant, dans l’hypothèse d’une location, que les revenus soient destinés à la seule fondation pour la réalisation de ses fins. »
Aux termes de l’acte d’acquisition d’un ensemble immobilier par la société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) auprès de la Fondation Maison de poésie en date des 7 avril et 30 juin 1932, il est stipulé que « n’est toutefois pas comprise dans la présente vente et est au contraire formellement exclue la jouissance ou l’occupation par la Maison de poésie et par elle seule des locaux où elle est installée actuellement et qui dépendent dudit immeuble ».
Sur ce fondement, et notamment au regard de la mention à « la jouissance ou l’occupation », tant les juges du fond que les juges du Quai de l’horloge ont pu déduire que le droit de jouissance sui generis dont bénéficiait la Fondation Maison de poésie lui offrait une alternative : soit occuper elle-même les locaux, soit en jouir « en en percevant les fruits que constituent les loyers », ce qui ouvrait donc la voie à la location des biens.
Le fait que la jouissance ou l’occupation soit, aux termes de la convention, réservée à la Fondation (« et par elle seule ») n’est pas de nature à remettre en cause cette faculté de location, dès lors que les fruits de la jouissance que constituent les loyers sont « destinés à la Fondation pour la réalisation de ses fins », à savoir la promotion de la poésie.
Selon les juges, c’est en ce sens que doit être comprise l’exclusivité accordée à la Fondation, et non pas comme réservant de manière exclusive l’occupation des biens par le titulaire du droit.