Le contexte énergétique actuel se divise entre besoin croissant d’énergie et volonté de consommer de manière plus écologique. Dans cette optique, le développement de l’énergie solaire ne cesse de s’accélérer, et les investisseurs sont à la recherche de terrains pouvant accueillir des panneaux photovoltaïques.
Le rendement d’un projet photovoltaïque dépendant en grande partie du choix du site d’implantation, notamment de son exposition, rend les terrains propices très attractifs et concurrentiels pour les investisseurs qui cherchent à les louer. Par ailleurs, ces terrains, situés le plus souvent en zone naturelle, ne sont en principe pas constructibles, mais peuvent accueillir des centrales photovoltaïques, ce qui peut s’avérer très intéressant pour les propriétaires.
A la suite des démarches d’autorisations nécessaires à l’exploitation d’un site photovoltaïque, notamment au regard du droit de l’urbanisme, les parcelles sont louées à un opérateur qui réalise l’implantation des panneaux solaires et des réseaux nécessaires au raccordement électrique. En contrepartie, le propriétaire perçoit un loyer durant toute la durée d’exploitation du site. Au terme du bail, les installations sont en général démontées, le terrain rétabli à son état d’origine puis remis au propriétaire.
Afin d’éclairer les particuliers sur la mise en place de cette location, trois catégories appropriées de baux seront détaillées. En revanche, il ne sera pas évoqué le bail commercial car il ne semble pas pertinent dans cette situation.
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AVANTAGES | INCONVENIENTS |
BAIL EMPHYTEOTIQUE (Articles L. 451-1 et suivants du Code rural) |
– Durée entre 18 et 99 ans
– Peut être combiné avec une opération de crédit-bail – Peut être librement cédé par le preneur – Confère un droit réel immobilier au preneur pouvant être hypothéqué – Confère au preneur une prérogative de construction d’ouvrages dont il sera propriétaire pendant toute la durée du bail – Liberté contractuelle dans la fixation du loyer : dans le cas d’une centrale photovoltaïque, il est souvent prévu le démantèlement des installations à la fin du bail, donc le montant du loyer est plus élevé qu’usuellement. Cette faculté n’est pas susceptible de remettre en cause la nature du bail. |
– Pas de faculté légale d’aligner le loyer à la valeur locative en cas de révision ou de renouvellement[1]
– Le bail ne doit pas stipuler, comme cela se rencontre souvent en pratique, que le preneur s’engage à édifier une centrale photovoltaïque à risque de requalification en bail à construction – Le bail ne peut pas comporter de clause ayant pour effet de réduire la durée du bail à moins de 18 ans, ni de clause résolutoire de plein droit avant cette durée sous peine de requalification en bail rural[2]. |
BAIL A CONSTRUCTION
(Articles L. 251-1 et suivants du Code de la construction et de l’habitation) |
– Durée entre 18 et 99 ans
– Confère un droit réel immobilier au preneur pouvant être hypothéqué – Alignement entre la valeur du loyer et la valeur locative en cas de renouvellement ou de révision du bail – Obligation de construire et non simple faculté comme dans le bail emphytéotique |
– Fiscalité en cas de volonté de conserver les constructions :
Ø Si durée du bail supérieure à 30 ans : pas d‘imposition Ø Si durée du bail inférieure à 30 ans : imposition au titre des revenus fonciers avec une décote de 8% par an après la 18ème année[3] – Tout comme pour le bail emphytéotique, interdiction des clauses de résolution anticipée avant l’expiration d’une durée minimale de 18 ans |
BAIL CIVIL DE DROIT COMMUN
(Articles 1713 et suivants du Code civil) |
– Grande liberté contractuelle : la durée peut être fixée librement et une clause de renouvellement peut être prévue | – Ne confère pas de droit réel :
Ø Preneur non tenu d’une obligation générale de conservation ou d’entretien du bien loué, il faut le préciser dans le contrat de bail mais cela est plus complexe à mettre en place que dans les baux emphytéotiques ou à construction Ø Impossibilité d’inscription d’hypothèque ou de conclusion de servitude nécessaire à la centrale |
Il ressort de cette présentation que le bail civil présente une grande liberté contractuelle mais ne permet pas de conférer de droits réels au preneur, ce qui l’empêche, par exemple, de donner le bien en garantie dans le cadre d’un financement. Les baux les plus adaptés semblent par conséquent être le bail emphytéotique et le bail à construction au regard de leurs facultés à assurer automatiquement la conservation et l’entretien de l’ensemble des bâtiments, et à permettre au preneur de pouvoir hypothéquer ce bail. L’ampleur du projet pourra entrer en ligne de compte dans le choix entre les deux baux car, pour qu’un bail à construction soit consenti, il faut que le projet soit d’une importance suffisante pour qu’il soit assimilé à une construction. Il faut également préciser que ces deux types de baux, d’une durée minimale de 18 ans, ne peuvent être consentis que par acte notarié, ce qui leur confère une sécurité juridique supplémentaire[4].
Par ailleurs, entre le bail emphytéotique et le bail à construction, le choix devra porter sur le bail à construction lorsque l’installation d’une centrale photovoltaïque a également un but subsidiaire. Par exemple, lorsque cette installation est mise en place sur un bâtiment et a pour fonction d’assurer l’étanchéité de celui-ci. En effet, l’obligation de construire dont ce bail fait objet assurera ainsi au bailleur d’être certain d’obtenir cette étanchéité.
En revanche, le bail emphytéotique présente des avantages dans le cas où un terrain nu est loué et que le propriétaire souhaite le récupérer dans son état initial lors de la fin du bail. En effet, dans le cadre d’un bail à construction, tel que son nom l’indique, les constructions doivent ensuite être conservées et reviennent par principe au bailleur en fin de bail, contrairement au bail emphytéotique où il est souvent prévu qu’elles soient démantelées afin de rendre la parcelle nue au propriétaire.
Dans tous les cas il convient d’être prudent lors de la rédaction du bail en prévoyant une clause de réserve de propriété, désignant précisément le système photovoltaïque, et stipulant clairement que le preneur en sera propriétaire pendant toute la durée du bail.
[1] Article L. 145-33 du Code de commerce
[2] CA Aix-en-Provence, 13 sept. 2010, n° 09/12009
[3] V. JCl. Fiscalité immobilière, fasc. 765. – B. Mortier, La fiscalité du bail à construction : JCP N 1997, n° 18, 4027
[4] Force probante et force exécutoire – https://paris.notaires.fr/fr/actualites/location-immobiliere-le-bail-notarie-un-gage-de-securite