Cheuvreux Paris

Aux confins de la famille confinée : Episode 3 «Protégeons nos aînés»

23 Avr 2020 Veille juridique

Peut-on efficacement initier ou mettre en œuvre les mesures de protection juridiques des personnes vulnérables pendant la période de l’état d’urgence sanitaire ?

 

Si l’on n’a pas anticipé ?

Lorsqu’aucune mesure n’a été prise ou anticipée mais qu’il est nécessaire de protéger une personne majeure et/ou tout ou partie de son patrimoine parce qu’elle n’est plus en état de veiller sur ses propres intérêts en raison d’une maladie, d’un handicap, ou d’un accident survenu dans une telle situation inédite, le recours aux mesures judiciaires reste la seule option.

Qui dit mesures de protection judiciaires dit intervention d’un juge !

C’est, en effet, le juge des contentieux de la protection qui décide de la mesure de protection juridique à prendre : soit la sauvegarde de justice, soit la curatelle, soit encore la tutelle.

  • La sauvegarde de justice, la curatelle ou la tutelle

Dans ce cas, si l’initiative de la mise en place d’une telle mesure peut venir de la personne elle-même, d’un proche (autre membre du couple, famille, allié ou ami proche) et dans certains cas du procureur de la République (sur demande d’un médecin notamment), c’est toutefois au juge que revient la décision d’édicter la mesure de protection. Il devra la prendre en considération du degré de l’altération des facultés de la personne à protéger et/ou si elle est en grande difficulté sociale et faire en sorte que la protection soit la moins contraignante possible et en, priorité être exercée par la famille.

Et dans ce cas, pas de place pour la personne elle-même ou les proches dans la maîtrise du choix d’un régime de protection juridique !

Quelle graduation entre ces différentes protections ?

Le critère sera le degré de contrainte appliqué aux actions du majeur qui en fait l’objet. La mesure à prendre doit être proportionnée et individualisée en fonction du degré d’altération des facultés personnelles de l’intéressé. La tutelle est la mesure de protection juridique ayant le plus de conséquences sur les actions du majeur protégé. Les autres protections sont moins limitatives de sa liberté d’action.

Sous le régime de la tutelle, la personne à protéger sera représentée par un tuteur pour les actes relatifs à la gestion de ses biens (acte de disposition avec l’autorisation préalable d’un juge, et acte d’administration) à l’exclusion des actes strictement personnels (mariage, PACS ou reconnaissance d’un enfant).

Sous le régime de la curatelle, la personne à protéger peut gérer et administrer ses biens librement, mais doit être assistée de son curateur pour tous les actes de disposition.

Sous le régime de la sauvegarde de justice, la personne conserve le droit d’accomplir tous les actes de la vie civile, sauf ceux confiés au mandataire spécial.

En tout état de cause, le tuteur, et le curateur ont l’obligation de remettre annuellement au juge un compte annuel de gestion qui retrace l’ensemble des opérations et flux effectués sur le compte de gestion pendant l’année écoulée (ressources et dépenses), ce qui permet de vérifier que le représentant légal s’acquitte avec diligence de ses obligations et que les intérêts de la personne protégée sont correctement administrés et défendus.

  • L’habilitation familiale

Il existe une autre mesure qui n’entre pas dans le cadre des mesures de protection judiciaire et qui constitue une véritable alternative : l’habilitation familiale.
Sa grande souplesse en fait un outil privilégié ayant pour fondement la confiance en un membre privilégié de la famille.
Une fois la personne désignée pour recevoir l’habilitation familiale, le juge n’intervient plus. Le cercle familial veille sur la personne protégée sans contrôle a posteriori du juge, sans compte de gestion annuel.
Les critères de désignation sont similaires aux mesures judiciaires de protection ci-dessus.

L’habilitation familiale entre époux permet à un époux de se faire habiliter par un juge à représenter de manière générale son conjoint empêché dans l’exercice des pouvoirs résultant du régime matrimonial.

L’habilitation familiale générale permet d’habiliter une personne du cercle familial proche : un descendant, un ascendant, un frère ou une sœur, un époux, un concubin, un partenaire de Pacs.

La personne habilitée peut réaliser des actes conservatoires, des actes d’administration et sur mandat spécial, des actes de disposition nécessaires à la gestion du patrimoine de la personne protégée. Certains actes nécessitent toutefois de solliciter l’autorisation préalable du juge des tutelles, notamment pour consentir une donation, renoncer à une succession, les actes portant sur le logement de la personne protégée (signer ou résilier un contrat de bail, acheter ou vendre la résidence principale ou secondaire, vendre les meubles du majeur protégé).

L’habilitation familiale est mise en place pour une durée maximum de 10 ans, pouvant être renouvelée, ou de maximum 20 ans lorsque la situation de la personne protégée n’est pas susceptible d’amélioration.

Le juge peut aussi décider d’une habilitation limitée, portant sur un ou plusieurs actes d’administration ou de disposition des biens, ou relatifs à la personne elle-même. La mission s’exerce alors dans le respect des dispositions relatives à la tutelle et à la curatelle.

Difficultés de mise en œuvre en cette période d’urgence sanitaire…

Or, qui dit juge en période d’urgence sanitaire, dit difficultés de mise en œuvre efficaces et rapides.

En raison des mesures gouvernementales actuelles limitant les déplacements et le regroupement des personnes afin de lutter contre la crise sanitaire, les tribunaux sont actuellement fermés sauf en ce qui concerne le traitement des contentieux essentiels.
L’obtention du certificat médical circonstancié devant être établi par un médecin inscrit sur la liste des médecins établie par le procureur de la République, est également compliquée en cette période.

Sauf si des mesures urgentes relevant du juge s’avéraient impératives pour protéger une personne vulnérable comme une situation d’abus de faiblesse, les mesures de protection seront reportées après la période de confinement.

Le mot d’ordre est l’anticipation ! Mettons cette période à profit pour réfléchir et organiser de manière conventionnelle notre protection dans l’avenir en cas de perte d’autonomie.

 

Comment anticiper ?

La période inédite de crise sanitaire que nous vivons met en lumière la nécessité d’anticiper les mesures pour soi-même afin de prévenir une incapacité future. Il existe plusieurs outils juridiques permettant d’organiser la gestion des décisions d’ordre patrimonial en cas d’altération de ses facultés mentales ou physiques.

  • La procuration générale

La gestion des affaires courantes d’une personne comme la gestion de ses comptes bancaires, la présence aux assemblées générales de copropriété, aller chercher un recommandé à la poste ou encore le paiement de factures peut faire l’objet d’un mandat limité à certaines actions ou d’un mandat général. La procuration peut prendre la forme d’un acte sous seing privé mais la forme authentique sera privilégiée, les actes authentiques pouvant être signés « à distance » par visio-conférence comme l’y autorise le décret du 3 avril 2020.

La procuration sous forme d’acte authentique permet de s’assurer de la capacité et du consentement du mandant par le notaire, évitant ainsi les cas de contentieux, notamment familiaux. L’acte notarié procure une date certaine et une force probante puisque son contenu est vérifié par le notaire. Dans certaines situations toutefois, une procuration spéciale devra être mise en œuvre. Il en sera par exemple ainsi pour passer un acte de l’état civil, déposer une déclaration au service des impôts ou encore constituer un gage ou un nantissement.

  • Le mandat de protection future

Le « mandat de protection future » permet à toute personne (le mandant) de désigner par avance, un ou plusieurs mandataires chargé(s) de le représenter si le mandant se trouve un jour en situation d’incapacité physique ou psychologique. Voilà donc un outil qui permettra d’éviter de recourir aux mesures de protection judiciaire vues ci-dessus et par lequel la personne (le mandant) pourra donner toutes indications utiles et souhaitées sur la gestion de son patrimoine.

Les pouvoirs que le mandant peut confier au mandataire varient selon la forme de l’acte : si le mandat de protection future est conclu par acte sous seing privé, le mandataire pourra accomplir tout acte de gestion et d’administration mais ne pourra pas passer d’actes de disposition (comme la vente d’un bien élément du patrimoine du mandant par exemple). Si au contraire le mandat est conclu par acte notarié, le mandataire pourra se voir confier le pouvoir de vendre les éléments du patrimoine du mandant.

Bien entendu, une fois que le mandat est entré en application, la gestion du mandataire est contrôlée : celui-ci doit rendre compte de sa gestion (i) auprès du juge, si le mandat a été conclu par acte sous seing privé, (ii) et au notaire qui a reçu ce mandat si celui-ci a été conclu par acte notarié (le notaire doit signaler au juge tout acte susceptible de s’inscrire contre les intérêts du mandant). Enfin, saisi par tout intéressé, le juge peut à tout moment, contrôler l’exécution du mandat, voire le révoquer si les intérêts du mandant se trouvent fragilisés.

Notons enfin que, pour mettre en œuvre le mandat, le mandataire devra présenter au juge de proximité un certificat médical établissant l’incapacité du mandant, accompagné de l’acte de mandat.

Ici encore la fermeture actuelle des tribunaux pose des difficultés pour mettre en œuvre des mandats conclus antérieurement au confinement et à l’état d’urgence, mais rien n’empêche en revanche de conclure de tels mandats pendant cette période. S’agissant des mandats conclus par acte notarié, ceux-ci peuvent aussi être signés « à distance » par visio-conférence.

***

Retrouvez les prochains épisodes de “Aux confins de la famille” dans nos prochaines newsletters.

Portez-vous tous bien,

Les équipes de CHEUVREUX




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