S’il était déjà établi que l’illégalité initiale du projet peut être purgée en tirant bénéfice d’une évolution postérieure et favorable de la règle invoquée à l’appui d’un recours dirigé contre l’autorisation initiale ou d’un changement dans les circonstances de fait de l’espèce venant conforter la légalité du projet, le Conseil d’État s’est saisi de cette affaire pour clarifier sa jurisprudence constante en matière de régularisation des autorisations d’urbanisme et réaffirmer la nécessité de la délivrance d’une nouvelle décision individuelle de l’autorité compétente valant mesure de régularisation
Par une décision du 4 mai 2023 publiée au recueil, le Conseil d’État apporte de nouvelles précisions en matière de régularisation d’un permis de construire dans le cadre de l’application du sursis à statuer prévu à l‘article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme.
Dans la présente affaire, par un premier arrêté délivré en 2018, une société obtient le permis de construire un immeuble comprenant 29 logements et quelques commerces. Par un second arrêté délivré en 2020, la société obtient une autorisation modificative. En 2021, le Tribunal administratif de Toulouse, saisi par une association d’un recours en annulation contre ces deux autorisations, constate l’illégalité des autorisations et sursoit à statuer en application de l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme pour permettre à la société bénéficiaire de régulariser le vice tenant aux règles de hauteur. Entretemps, le PLU évolue favorablement au projet. Toutefois, en 2022, faute de régularisation dans le délai imparti, le tribunal annule ces autorisations par un second jugement.
La société bénéficiaire des autorisations annulées se pourvoit en cassation, interrogeant le Conseil d’État sur le point de savoir s’il est possible de considérer la situation comme étant régularisée par la seule évolution de la règle d’urbanisme, postérieurement à l’application du sursis à statuer prévu à l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme. Dit autrement, l’évolution de la règle d’urbanisme méconnue entraine-t-elle une régularisation automatique de l’autorisation initiale non conforme à cette règle ?
Le Conseil d’État confirme le jugement du Tribunal et considère que l’évolution de la règle d’urbanisme au moment où le juge statue après sursis n’est pas, à elle seule, suffisante pour régulariser une autorisation qui l’avait méconnue. Partant, le juge ne pouvait rejeter la demande d’annulation de l’association.
Cette décision n’est pas surprenante dans la mesure où en application des règles qui gouvernent le régime contentieux de l’excès de pouvoir, la légalité d’une autorisation d’urbanisme doit être appréciée à la date de son édiction, et non au regard d’une norme réglementaire postérieure. Partant, la disparition d’une règle enfreinte initialement – et ayant entrainé l’application du sursis à statuer de l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme – n’entraine pas de fait la régularisation de l’autorisation litigieuse. Le bénéficiaire doit solliciter une autorisation modificative dans le temps qu’il lui est imparti dans le cadre du sursis à statuer, et ce même s’il s’agit, en pratique, de déposer un dossier de demande identique au dossier initial.