Une dérogation « espèces protégées » est requise dès lors que le projet présente un risque suffisamment caractérisé pour les espèces protégées. Ce risque doit être apprécié en tenant compte uniquement des mesures d’évitement et de réduction. Si ces mesures sont suffisamment efficaces pour faire disparaître le risque caractérisé, alors la dérogation n’est pas nécessaire.
En l’espèce, par arrêté du 17 juin 2022, le préfet délivre au porteur d’un projet l’autorisation environnementale sollicitée pour la création et l’exploitation d’un parc éolien composé de cinq aérogénérateurs, d’une hauteur totale de 165 mètres et de deux postes de livraison.
Par un arrêt du 16 avril 2024, la cour administrative d’appel de Nantes, après avoir jugé irrecevable l’intervention présentée par plusieurs particuliers au soutien de la requête, modifie le montant de la garantie financière de démantèlement fixée par l’arrêté litigieux et rejette les conclusions tendant à l’annulation de cet arrêté.
Plusieurs associations se pourvoient en cassation contre cet arrêt.
Le Conseil d’État rappelle les conditions cumulatives à remplir pour obtenir une dérogation à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées, conformément au droit de l’Union européenne, codifiée aux articles L. 411-1 et L. 411-2 du Code de l’environnement :
- Absence de solution alternative satisfaisante pour la réalisation du projet ;
- Ne pas nuire au maintien dans un état de conservation favorable des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle ;
- Justification par l’un des cinq motifs limitativement énumérés par le texte à savoir que le projet réponde à une raison impérative d’intérêt public majeur.
Une telle dérogation est requise dès lors que le projet présente un risque suffisamment caractérisé pour les espèces protégées. Ce risque doit être apprécié en tenant compte uniquement des mesures d’évitement et de réduction. Si ces mesures sont suffisamment efficaces pour faire disparaître le risque caractérisé, alors la dérogation n’est pas nécessaire. Ce mode d’emploi découle directement de l’avis du Conseil d’État n° 463563 du 9 décembre 2022.
Dans le cas d’espèce, la Cour administrative d’appel de Nantes estime que le projet ne présente pas un risque suffisamment caractérisé d’atteinte aux espèces faunistiques protégées, notamment en raison de la plantation de nouvelles haies destinée à compenser la destruction de haies bocagères. Elle juge ainsi l’impact « très faible à modéré ».
Or, le Conseil d’État censure cette analyse : la cour a commis une erreur de droit en tenant compte de mesures de compensation, alors que seules les mesures d’évitement et de réduction doivent être considérées pour apprécier le risque résiduel. En conséquence, les associations requérantes sont fondées à demander l’annulation de l’arrêt attaqué.