La réalisation de travaux de construction donne naissance à de nombreux litiges en matière d’assurance dommages-ouvrage. La Cour de cassation se prononce, dans un arrêt du 3 avril 2025 sur deux points : les conséquences de l’acceptation de mise en jeu du contrat par l’assureur sur le périmètre des dégâts à indemniser à ce titre en cas de sinistre, et la responsabilité solidaire des constructeurs en la matière.
Dans cet arrêt, la Haute Cour rappelle que l’assureur saisi d’un sinistre ne peut pas exclure de l’indemnisation versée une partie des dommages subis, dès lors qu’il a accepté de mettre en œuvre le contrat souscrit par l’assuré auprès de lui. La question du périmètre de la prise en charge des frais de réparation par l’assureur peut pourtant se poser si le sinistre occasionne, outre des dégâts portant atteinte à la solidité de l’ouvrage ou le rendant impropre à sa destination, d’autres désordres qui ne fragilisent pas la construction, tels par exemple la pose de fenêtres défectueuses. Par ailleurs, le sinistré amené à débourser des frais pour se reloger pendant les travaux de remise en état, peut se heurter à un refus de remboursement par les constructeurs concernés, au titre de l’article 1792 du Code civil.
Des particuliers se sont retrouvés dans cette situation après avoir confié la réalisation des travaux de construction d’un pavillon à un entrepreneur et à un maître d’œuvre, chacun bénéficiaire d’un contrat d’assurance dommages-ouvrage. A la suite de la réception des travaux, divers désordres sont apparus, notamment des dysfonctionnements de baies vitrées et de portes intérieures. Les propriétaires se sont alors tournés vers l’assureur du maître d’œuvre afin d’être indemnisés, et se sont vu opposer pour ces dommages soit un refus de garantie, soit des propositions d’indemnisation, mais qu’ils ont jugé insuffisantes.
Les juges du fond, saisis du litige, se sont prononcés en faveur de l’assureur, jugeant qu’il n’était pas tenu de verser des indemnités complémentaires pour des désordres non couverts par la garantie décennale.
Les propriétaires forment alors un pourvoi en cassation devant la troisième Chambre civile, qui casse partiellement l’arrêt de la Cour d’appel : elle retient qu’en proposant une indemnisation suite aux dommages subis, l’assureur avait reconnu sa responsabilité. Ayant accepté de faire jouer le contrat d’assurance dommages-ouvrage, il ne pouvait plus refuser de le mettre en œuvre, et était tenu de financer les travaux nécessaires pour remédier à l’ensemble des désordres survenus.
Par suite, la responsabilité décennale tant de l’entrepreneur que du maître d’œuvre étant confirmée, la Cour de cassation rappelle que ceux-ci doivent solidairement indemniser les propriétaires, pour réparer non seulement les préjudices matériels, mais également les préjudices immatériels, en l’occurrence les frais de relogement, de garde-meuble et de déménagement qu’ils ont dû débourser lors de la réalisation des travaux de remise en état du carrelage de leur pavillon.
Cass. 3ème civ. 3 avril 2025, n° 23-16.055