Le 21 septembre 2022, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation a rendu un arrêt très instructif quant à l’étendue de l’obligation d’information spéciale prévue à l’article L. 514-20 du Code de l’environnement.
Pour rappel, il ressort de l’article L. 514-20 du Code de l’environnement que le vendeur d’un terrain sur lequel a été exploitée une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) soumise à autorisation ou à enregistrement est tenu d’en informer par écrit l’acheteur. Le vendeur doit aussi l’informer pour autant qu’il les connaisse, des dangers ou inconvénients importants qui résultent de l’exploitation. Le cas échéant, en l’absence d’information, l’acheteur peut demander l’annulation de la vente, la restitution d’une partie du prix ou la remise en état du site aux frais du vendeur, si le coût n’est pas disproportionné par rapport au prix de vente.
Dans la présente affaire, en vue de réaliser une ligne de tramway, la Communauté Urbaine de Bordeaux (CUB) a acquis des parcelles qui constituaient l’entrée d’une usine de traitement de déchets d’usine à gaz de manière à en extraire le soufre noir, installation classée soumise à autorisation exploitée entre 1893 et 1961, abritant depuis 1926, un bâtiment à usage de logement pour le gardien.
A l’occasion des travaux, la CUB découvre dans le sol différents métaux et produits chimiques en quantités anormales, révélateurs d’une pollution d’origine industrielle et devant être traités en tant que déchets dangereux. Bordeaux Métropole venant aux droits de la CUB décide alors de saisir le juge judiciaire notamment sur le fondement de l’obligation d’information environnementale prévue par le Code de l’environnement à l’article L. 514-20.
Pour écarter l’application de cette disposition, la Cour d’appel de Bordeaux retient qu’il n’est pas démontré qu’une activité classée a bien été exercée sur les parcelles abritant depuis 1926 un bâtiment à usage de logement.
La Cour de cassation censure le raisonnement de la Cour d’appel en considérant qu’il ressortait au contraire des éléments d’espèce que la parcelle constituait l’entrée de l’usine exploitée de 1893 à 1961 et que l’habitation était une maison de gardien, ce dont il résultait que le terrain vendu était inclus dans le périmètre de l’installation classée soumise à autorisation. En d’autres termes, le terrain vendu se situait bien dans le périmètre d’une ICPE soumise à autorisation, impliquant dès lors que l’acquéreur en soit informé au regard des dispositions de l’article L. 514-20 précité.
Au soutien de cette nouvelle décision, la Haute juridiction étend encore davantage le champ d’’application de l’obligation d’information spéciale incombant au vendeur s’agissant des ICPE soumise à autorisation ou à enregistrement. Dans le même sens, rappelons que la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser dans une décision du 22 novembre 2018 (Cass. 3ème civ. 22 novembre 2018, n° 17-26.209) que l’application de l’article L. 514-20 du Code de l’environnement suppose « qu’une installation ait été implantée, en tout ou partie, sur le terrain vendu ».
Cass. 3ème civ. 21 septembre 2022, n° 21-21.933