La garantie décennale est d’ordre public. La Cour de cassation, par un arrêt du 23 mai dernier, réaffirme cette solution pourtant bien ancrée.
Les faits sont plutôt ordinaires. Le 22 février 2014, un couple acquiert une maison que les vendeurs ont fait construire et dont la réception a été prononcée le 19 mars 2009. Le contrat précise que le système d’assainissement n’est pas conforme et que l’acquéreur fait « son affaire personnelle des conséquences éventuelles de cette situation sans recours contre le vendeur ». Les acquéreurs, se plaignant de divers désordres, assignent leurs vendeurs en réparation de ceux-ci.
La demande est admise par la Cour d’appel de Rennes qui considère que les constructeurs ne peuvent, en application de l’article 1792-5 du Code civil, se prévaloir de clauses ayant pour objet de limiter ou d’exclure leur responsabilité décennale. La clause doit être réputée non écrite indifféremment de la connaissance, par les acquéreurs, de l’état de l’assainissement et qu’ils aient déclaré, dans l’acte de vente, en faire leur « affaire personnelle ».
La Cour de cassation rejette le pourvoi. Le rejet était prévisible dès lors que, quatre ans plus tôt, la même chambre avait affirmé, dans un arrêt largement commenté, que la clause qui avait « pour effet d’exclure la garantie décennale des constructeurs […] devait […] être réputée non écrite » (Cass. 3eme civ. 19 mars 2020, n° 18-22.983). Les faits étaient tout particulièrement similaires, le rejet du pourvoi était inévitable.
Ainsi, parce que le régime de responsabilité des constructeurs est d’ordre public, les parties ne peuvent ni exclure ni limiter la responsabilité décennale du vendeur. Ces clauses de « non-recours » seront tenues pour non écrites. Cette solution est une application orthodoxe des dispositions de l’article 1792-5 du Code civil. Cependant, l’arrêt nous apporte un double enseignement.
Le premier porte sur l’indifférence des circonstances entourant la clause. L’arrêt nous renseigne sur le fait que « l’état de l’assainissement ait été porté à la connaissance des acquéreurs et que ceux-ci aient déclaré en faire leur affaire » constituent des circonstances indifférentes. Ainsi, la Cour de cassation refuse que les parties puissent prévoir une clause de « non-recours » alors même que celle-ci viserait des désordres identifiés et connus de l’acquéreur.
Le second est relatif au champ de cette décision. Les clauses de « non-recours » demeurent valables en dehors du droit de la construction. Au travers de cette décision, la Cour de cassation ne remet pas en cause la validité des clauses de « non-recours » sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun (art. 1643 c. civ.). La solution ne porte que sur la responsabilité, d’ordre public, du constructeur et non sur celle du vendeur, laissée à la libre négociation des parties.