Cheuvreux Paris

La distinction entre sous-location et contrat de mise à disposition avec fourniture

29 Oct 2024 Newsletter

Une SCI consent à une autre société un bail commercial portant sur un local à usage de stockage et de bureau. La sous-location est interdite sans le consentement du bailleur. Le bailleur découvre en cours de bail que sa locataire met à disposition de plusieurs sociétés des bureaux au travers de contrats intitulés « prestations de services et mises à dispositions de bureaux ». Dans le cadre de ces conventions, la société locataire assure à ses cocontractants, outre la mise à disposition des bureaux, un certain nombre de prestations comme l’entretien, l’accueil et la sécurité, la souscription de l’assurance ou encore la connexion wifi. La bailleresse considère que ces contrats constituent des sous-locations irrégulières.

La Cour d’appel de Rennes (12 octobre 2022, n° 21/06583) qualifie les contrats ainsi consentis par la locataire de sous-location estimant que la prestation essentielle est la mise à disposition exclusive pour une durée indéterminée de bureaux. Elle se fonde pour ce faire sur plusieurs éléments : la mention par les contrats du numéro et de la surface des bureaux, l’accès permanent conféré aux entreprises  tenues pour leur part de maintenir les lieux en bon état d’entretien et d’en assurer la fermeture, mais aussi la fixation de la contrepartie en fonction de la superficie du bureau mis à disposition et pas seulement par la prestation de service, ainsi que le caractère renouvelable par tacite reconduction des conventions (dont la durée est fixée à un mois).

La locataire se pourvoit alors en cassation alléguant que les conventions ainsi conclues ne peuvent être qualifiées de sous-location alors que la mise à disposition des bureaux est assortie de nombreuses prestations de services comprises dans le prix des bureaux en fonction de leur surface et qui constituent une condition essentielle et nécessaire à la mise à disposition des locaux.

La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa des articles 1709 du Code civil et L. 145-31 du Code de commerce.

La référence à l’article 1709 du Code civil se comprend aisément dans la mesure où la sous-location est un bail au sens de ce texte.

La Cour vise également l’article L. 145-31 du Code de commerce qui constitue le fondement de l’action en réajustement du loyer principal au cas où le loyer de la sous-location serait plus important, et indique que la qualification de sous-location au sens de ce texte « est exclue lorsque le locataire met à disposition de tiers les locaux loués moyennant un prix fixé globalement, qui rémunère indissociablement tant la mise à disposition des locaux que des prestations de service spécifiques recherchées par les clients » [ndlr : souligné par nos soins].

Or, la Haute Juridiction considère que les juges du fond ne peuvent retenir la qualification de sous-location alors qu’il résulte de leurs constatations que « la redevance fixée globalement rémunérait indissociablement tant la mise à disposition de bureaux équipés que les prestations de service spécifiques recherchées par les clients ». Aussi, « la cour d’appel, par des motifs impropres à caractériser des contrats de sous-location au sens de l’article L. 145-31 du code de commerce, a violé » les articles 1709 et L. 145-31 alinéa 3 du Code de commerce» [ndlr : souligné par nos soins].

La Cour écarte donc dans cette décision la qualification de sous-location au sens de l’article L. 145-31 du Code de commerce en raison de la globalité du prix du contrat conférant la mise à disposition de locaux et la fourniture de prestations de services. Deux auteurs relèvent qu’ « il n’est pas possible de requalifier le contrat en deux contrats distincts : une sous-location d’une part, un contrat de prestation de services d’autre part, dès lors qu’il n’y a qu’un seul prix pour l’ensemble » (J-H Barbier, S. Valade, Un contrat de prestations de service n’est pas un bail, Dalloz actualité, 10 juillet 2024). La demande en réajustement du loyer de l’article L. 145-31 du Code de commerce ayant vocation à s’appliquer seulement en cas de sous-location, c’est donc logiquement que cette demande du bailleur est rejetée.

Ce n’est pas la première fois que la Cour de cassation écarte la qualification de sous-location dans le cadre d’une demande de réajustement du loyer. L’on peut citer à titre d’exemple un arrêt rendu en 2002 dans lequel elle avait écarté cette qualification du fait des « limitations à la jouissance des lieux, des nombreuses prestations relatives à l’équipement et à l’entretien des locaux assurées par la société Les Ateliers de Danse [la locataire principale], ainsi que le contrôle de l’accueil et de la sécurité conservés » par la locataire (Cass. 3ème civ. 13 février 2002, n° 00-17.994).

La qualification du contrat de mise à disposition conféré par le locataire principal à un bail commercial a – comme le démontre la décision commentée – toute son importance car elle présente un réel enjeu financier pour le bailleur dans la mesure où il ne peut exiger un réajustement du loyer principal en raison d’un sous-loyer plus élevé que si le contrat consenti par son locataire constitue une sous-location. Un autre enjeu de cette qualification réside dans le fait de savoir si le locataire peut ou non développer son projet ou s’il risque une résiliation du bail fondée sur la prohibition de principe des sous-locations en matière de bail commercial (à défaut de stipulation contraire ou d’accord du bailleur).

Mais encore faut- il que le bail autorise des mises à disposition sous cette forme ; or tel n’est souvent pas le cas, le bail principal imposant, d’une part, une destination et, d’autre part, une occupation personnelle sauf les sous-locations expressément autorisées (rappelons le principe posé par l’article L 145-31) ; aussi avant de s’engouffrer dans la voie d’une « mise à disposition assortie de prestations de service » une lecture attentive du bail principal s’impose. Et si une telle modalité d’utilisation des lieux est projetée, mieux vaut veiller à l’organiser expressément dans le contrat de bail principal.

 

Cass. 3ème civ. 27 juin 2024, n° 22-22.823

 




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