Par un arrêt du 1er mars 2023, la troisième chambre civile de la Cour de cassation fait application d’une jurisprudence antérieure selon laquelle la conformité des réalisations effectuées avec les objectifs poursuivis par la DUP doit s'apprécier au regard de l'ensemble des parcelles expropriées pour la réalisation de l'opération et non pas des quelques parcelles appartenant à l'exproprié, dépourvues de toute construction et n'ayant pas reçu la destination prévue (Cass. 3ème civ. 8 mars 1995, n° 92-18.791*) et juge que le droit de priorité prévu par l’article L. 424-2 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique trouve sa cause dans la non-affectation de la parcelle expropriée au but d’intérêt général défini par la déclaration d’utilité publique ; il se rattache au droit de rétrocession prévu à l’article L. 421-1 du même code et, comme lui, ne s’applique pas aux portions de parcelles non utilisées pour l’usage prévu par la DUP lorsque l’essentiel des parcelles expropriées a reçu cette destination.
En l’espèce, plusieurs terrains agricoles sont expropriés au profit d’un département, aux fins de réalisation d’une infrastructure routière déclarée d’utilité publique.
Après réalisation des travaux, le département vend à une société les reliquats de parcelles expropriées non utilisés. Leurs anciens propriétaires assignent le département en indemnisation des préjudices résultant de la méconnaissance de leur droit de priorité.
Par un arrêt du 9 décembre 2021, la Cour d’appel de Paris les déboute de leur demande sur le fondement de l’article L. 424-2 du Code de l’expropriation. Elle juge que cet article ne trouve sa cause qu’en cas de non-affectation de la parcelle expropriée au but d’intérêt général défini par la DUP, se rattache au droit de rétrocession prévu à l’ article L. 421-1 du même code , et, comme lui, ne s’applique pas aux portions de parcelles non utilisées pour l’usage prévu par la DUP si l’essentiel des parcelles expropriées a reçu cette destination.
La Cour de cassation valide cette analyse ; elle précise que la condition de non-affectation à l’usage prévu n’est pas remplie et que les expropriés ne bénéficient pas d’un droit de priorité lors de la cession à un tiers des parcelles concernées puisque les anciennes parcelles des anciens propriétaires non affectées à l’usage prévu par la DUP représentent seulement 3,2 % de la surface totale de l’opération d’expropriation.
Cass. 3ème civ. 1er mars 2023, n° 22-12.455
* Cass. 3ème civ. 8 mars 1995, n° 92-18.791