Dans un arrêt rendu le 12 juin 2023, le Conseil d’Etat apporte des précisions sur les qualifications d’ensemble immobilier unique et de constructions distinctes, et sur les modalités d’instruction d’un permis de construire unique portant sur des constructions distinctes.
Dans cette affaire, un permis de construire, délivré pour l’édification de deux villas et de deux piscines, fait l’objet d’un recours, s’appuyant notamment sur une méconnaissance des règles de hauteur par les deux villas prises dans leur ensemble.
L’appréciation de la légalité du permis dépendait de la qualification du projet comme ensemble immobilier unique, défini par le juge comme « une construction constituée de plusieurs éléments » comportant « des liens physiques ou fonctionnels entre eux ». Il est précisé que le fait qu’une construction, physiquement et fonctionnellement distincte d’une autre, ne puisse « fonctionner ou être exploitée sans l’autre, au regard de considérations d’ordre technique ou économique, (…) ne suffit pas à caractériser un ensemble immobilier unique ».
Le Conseil d’État rappelle qu’un ensemble immobilier unique doit en principe faire l’objet d’une autorisation unique, permettant à l’autorité administrative d’apprécier la légalité de l’ensemble du projet au regard des règles d’urbanisme (v. également CE 10 octobre 2007, n° 277314 : « des constructions indivisibles doivent faire l’objet d’un permis de construire unique »).
Par exception, des éléments de la construction ayant une vocation fonctionnelle autonome peuvent faire l’objet de permis distincts, à condition que l’ampleur et la complexité du projet le justifient. Dans ce cas, l’administration doit vérifier « par une appréciation globale, que le respect des règles et la protection des intérêts généraux que garantirait un permis unique sont assurés par l’ensemble des permis délivrés » (v. CE 17 juillet 2009, n° 301615, Commune de Grenoble).
En l’espèce, le juge considère que le projet comporte des constructions distinctes ; en effet, les deux villas et les deux piscines avaient comme seul lien un accès commun à la voie publique et aux réseaux, insuffisant pour caractériser un ensemble immobilier unique.
S’agissant de constructions distinctes, celles-ci « peuvent faire l’objet aussi bien de demandes d’autorisation distinctes que d’une demande d’autorisation unique, laquelle présente alors un caractère divisible » (v. également, sur le caractère divisible : CE 1er octobre 2015, n° 374338, Commune de Toulouse : « Considérant que lorsque les éléments d’un projet de construction ou d’aménagement auraient pu faire l’objet d’autorisations distinctes, le juge de l’excès de pouvoir peut prononcer l’annulation partielle de l’arrêté attaqué en raison de la divisibilité des éléments composant le projet litigieux »).
Dans le cas d’espèce, le pétitionnaire avait choisi de déposer une demande d’autorisation unique portant sur des constructions distinctes. Se posait dès lors la question de savoir si le respect des règles posées dans le PLU devait être apprécié au regard de chacune des constructions prises indépendamment, ou pour l’ensemble des constructions autorisées prises dans leur globalité. Le Conseil d’État tranche en faveur de l’indépendance : dans le cas de constructions distinctes faisant l’objet d’une demande d’autorisation unique, « la conformité aux règles d’urbanisme est appréciée par l’autorité administrative pour chaque construction prise indépendamment ». Cette solution permet, dans l’arrêt commenté, de reconnaître la légalité des constructions au regard des règles de hauteur posées dans le document d’urbanisme.